Deuxième et troisième voyages du capitaine James Cook
Deuxième voyage de James Cook
Glaces et habitants des régions subpolaires
Deuxième voyage de James Cook : Au cours de son second voyage (1772-1775), James Cook s’engagea profondément par trois fois vers le sud et démontra qu’il n’existait pas de continent habité dans ces parages. Après un retour vers le nord pour hiverner, il balaya le Pacifique, explora de nombreuses îles et, entre autres, l’île de Pâques ainsi que les Nouvelles-Hébrides.
12-30 décembre 1772, dans les eaux de l’Amérique : Au cours des 24 heures passées, avons défilé devant six îles de glace. Quelques-uns de ces messieurs ont aperçu du pont des manchots. Neige et neige fondue depuis 24 heures, température inférieure ou autour du point de congélation… Dépassé 18 autres îles de glace et vu des manchots. Ces manchots diffèrent des pingouins des autres parties du monde. Toutefois, leur progression dans l’eau est différente de tout ce que j’aie jamais vu; au lieu de nager comme les autres oiseaux, ils bondissent ou glissent comme le poisson que les marins appellent scarabée à ressort.
9 janvier 1773, dans les eaux de l’Antarctique : Apercevant des glaces dérivantes, nous mîmes trois embarcations à la mer. Avant de prendre des morceaux de glace à bord des embarcations, nous fûmes obligés de les briser à coup de hache. Le peau d’eau de mer qui adhérait à cette glace n’était même pas discernable au goût et quelques heures de séjour sur le pont suffirent à l’en débarrasser. Faire fondre la glace est ennuyeux, mais c’est le meilleur moyen pour se ravitailler en eau.
17 mars 1773, Nouvelle-Zélande : Après avoir mouillé, mon premier soin fut de dépêcher un canot et des gens à la pêche. Certains de ces messieurs gagnèrent un rocher où les phoques étaient nombreux et ils en tuèrent un. L’embarcation détachée à la pêche fut également heureuse et nous rapporta de quoi nourrir tout l’équipage au dîner; quelques heures de pêche le matin nous fournirent le déjeuner. Ceci nous donna l’espoir de pouvoir nous ravitailler en poisson d’une façon abondante.
6 août 1774, Nouvelles-Hébrides : Le navire à l’ancre, je me rendis à terre avec un fort groupe d’hommes sans rencontrer d’opposition de la part des nombreux îliens rassemblés et qui portaient des lances, des massues, des frondes, des arcs et des flèches. Une fois débarqué sur la plage, j’ai distribué aux vieux des morceaux d’étoffe, des médailles, etc., et j’ai donné l’ordre de remplir d’eau deux tonnelets à une mare toute porche. Nous obtînmes quelques noix de coco, mais ces gens refusèrent de se départir d’une quelconque de leurs armes, dont ils étaient sans cesse prêts à se servir. Peu de chose aurait suffi pour qu’ils nous attaquent mais notre rembarquement les déconcerta et ils se retirèrent.
Troisième voyage de James Cook
Troisième voyage de James Cook : Au cours de son troisième voyage (1776-1780), James Cook revient à Tahiti, son escale favorite, puis, découvrant les Hawaï, il remonta cap au nord jusqu’au détroit de Béring qu’il explora ainsi que la côte de l’Alaska, avant de revenir aux Hawaï. Il y fut traité en dieu, mais au faîte de sa carrière, il fut tué dans un engagement avec les indigènes.
À l’aube nous fîmes route sur Hapaee. En débarquant, je vis un rassemblement de gens. Bientôt, un certain nombre d’hommes armés de massues se joignirent à la foule. Ils nous offrirent le spectacle d’une succession de combats singuliers. Le champion d’un camp s’avançait et provoquait les hommes de l’autre camp à grand renfort de gestes plus que par la parole. Si le défit était accepté, les deux adversaires adoptaient l’attitude qui convient et engageaient le combat. Certains recevaient des coups dont ils devaient souffrir pendant quelque temps.
Le sacrifice d’un homme était prévu. La malheureuse victime paraissait être un homme d’un âge moyen. En général, leur choix se porte sur quelque coupable ou sur une personne de basse condition. On nous a dit qu’il avait été assommé d’un coup de pierre. Ceux que l’on choisit pour souffrir de la sorte ne sont jamais prévenus avant de recevoir le coup. Nous eûmes l’occasion d’assister à un de leurs heevas, ou spectacle. Les sœurs du roi portaient des robes élégantes et elles se sont acquittées de leur rôle avec distinction; quoique les intermèdes comiques, exécutés par quatre hommes, aient apparemment amusé davantage les spectateurs. Les habitants se distinguent par une délicatesse de formes et la blancheur de leur peau. Nous avons été frappés par les femmes; elles semblent posséder tous ces charmants appâts qui les distinguent des hommes. Le développement de la musculature, si marqué chez les indigènes des îles de l’Amitié et qui semblent résulter d’une vie très active, disparaît ici, dans ces îles où la fertilité du sol permet une existence indolente.
Les hommes ont les cheveux coupés à hauteur du cou, mais les femmes les laissent pousser et la plupart d’entre elles portent une mèche nouée au-dessus du front. Les indigènes des deux sexes ont les oreilles percées et arborent des chapelets de grains. Ils se percent aussi le septum (nez) et glissent par cet orifice des plumes de petits oiseaux. Mais la coutume la plus hideuse consiste à se fendre la lèvre inférieure, ou à la trouer. Cette incision s’élargit au point de permettre à certains d’y passer la langue.
Sur la glace, il y avait un nombre important de chevaux marins et, comme nous avions besoin de vivres frais, des embarcations furent dépêchées. Certains animaux réveillaient les autres à l’approche des embarcations et le troupeau se trouvait alerté en un instant. Une fois qu’on avait tiré sur eux, ils culbutaient à la mer en désordre.
Dans leurs demeures, ces indigènes sont pouilleux et répugnants. Les familles (car elles sont plusieurs à habiter une même hutte) disposent chacune d’un compartiment situé contre la paroi… Ces coins sont tenus à peu près propres, mais la partie centrale sert de tas d’ordures.
À onze heures du matin nous avons jeté l’ancre dans la baie que les indigènes appellent Karakakooa. Les bâtiments devinrent très encombrés par les indigènes et nous étions entourés d’une multitude de pirogues. Jamais je n’ai vu autant de gens assemblés en un même endroit. Outre tous ceux qui étaient venus jusqu’à nous à bord de leurs pirogues, la population avait envahi la plage, qui était noire de spectateurs, et de nombreux nageurs évoluaient comme des bancs de poissons. Nous ne pouvions pas ne pas être frappés par la singularité de cette scène.
Ainsi se termine le journal de James Cook, qui fut tué un mois plus tard, à ce même endroit, au cours d’une rencontre avec des indigènes. Comme l’écrit James King, un de ses lieutenants, « un accident survint, qui prit un tour fatal. Les bâtiments ayant tiré sur quelques pirogues, un chef fut tué. Les îliens s’armèrent et s’ensuivit une attaque générale. Notre infortuné commandant fut poignardé dans le dos et tomba le visage dans l’eau. Son corps fut immédiatement tiré sur la plage et entouré par les indigènes, qui firent preuve d’une sauvage avidité à prendre leur part de cette « destruction ». Ainsi finit notre grand et excellent commandant ».
D’après L’Âge des Découvertes par John R. Hale et les Rédacteurs des Collections Time-Life, 1967.
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