Les troubles politiques au Canada en 1849
Troubles de 1849 : Après les troubles de 1837-38 et les mesures de répression qui suivirent, les deux provinces du Bas et du Haut Canada furent réunies sous un gouvernement d’union législative. Il n’y eut plus alors que quarante deux députés pour chacune des provinces dans le nouveau parlement. C’était assurer la majorité parlementaire à la minorité anglaise du pays et rendre inefficace toute opposition politique des Canadiens.
Au cours d’une grande assemblée publique, Hyppolite Lafontaine, revenu des Etats-Unis, fit adopter une adresse, devant être présentée au parlement impérial, pour protester contre (( l’union arbitraire des provinces, aussi injustement représentées » dans la nouvelle Chambre; ce document, paraît-il, n’aurait jamais été envoyé à Londres. Mais la formation des partis devait bientôt rendre illusoire ce moyen de domination des anciens bureaucrates.
L’Acte d’union entra en vigueur le 10 février 1841 et le premier parlement unioniste fut aussitôt convoqué à Kingston. Aux élections du printemps les réformistes (libéraux canadiens) prirent vingt-six comtés; les tories (conservateurs) ne purent faire élire que seize de leurs candidats, favorables au gouvernement. Les rebelles de 1837 prenaient leur revanche légale. A Montréal les élus étaient G. Moffat négociant et B. Holmes, caissier de la Banque de Montréal. M. A. Delisle fut le choix du comté. En 1843, Pierre Beaubien remplaçait M. Moffat.
Aux élections de 1844, la lutte électorale fut très vive.
Au cours de la campagne, un jeune homme du nom de Johnson fut tué, et ses funérailles furent l’occasion d’un grand déploiement de sympathie de la part des amis du’ gouvernement unioniste.
Le malaise politique alla toujours s’accentuant jus qu’au jour où éclata une véritable révolte du parti anglais.
Il faut dire que depuis Bagot et sous Elgin, le gouvernement de la province avait viré de bord. Les libéraux canadiens et les réformistes du Haut-Canada avaient pris le pouvoir et gagné les représentants de la couronne à la politique canadienne, défendue apparemment sans résultat par le montréalais Louis-Joseph Papineau, durant 25 ans, et aussi apparemment compromise par les rebelles de 1837-38. L’on a depuis beaucoup chicané, au pied des échafauds de 1838-39; mais l’Angleterre, beaucoup plus sage, a compris la leçon de justice que signèrent de leur vie les douze pendus de Colborne. Par ses représentants au Canada, elle s’est hâtée de nous donner toutes les libertés que nos hommes d’État ont bien voulu prendre.
Sous le gouvernement d’union de 1849, le ministère Lafontaine présenta un projet de loi pour indemniser ceux dont les propriétés avaient été endommagées au cours des troubles de 1837-38. Cette dépense de quelques millions, approuvée par la Chambre, provoqua une vive et turbulente opposition parmi la population anglaise de Montréal. Le champs de Mars fut témoin d’assemblées populaires, où l’on dénonçait avec virulence la mesure du gouvernement. Le premier ministre Lafontaine y était accusé de vouloir récompenser ceux qu’on appelait les amis de la rébellion pour leur résistance armée au pouvoir établi. Le parti tory, n’ayant pas réussi à bloquer la mesure au parlement, prétendait empêcher le gouverneur Elgin de sanctionner la loi. Lorsqu’on apprit qu’il avait signé le parchemin, la foule, ameutée par quelques meneurs, insulta le représentant de la couronne à sa sortie de l’hôtel du gouvernement et lança des pierres sur sa voiture. Le chef de l’État dût se faire escorter par un détachement de cavalerie jusqu’à sa résidence de Monkland.
Dans la soirée du 25 avril, comme la Chambre avait repris son calme habituel, une bande de mécontents, poussés par des meneurs inconnus, fit tout-à-coup irruption dans les couloirs du parlement, envahit les salles du Conseil législatif et de la Chambre basse, en chassa conseillers et députés; puis se mit à saccager tout ce qui lui tomba sous la main. A la faveur du désordre, une main criminelle mit le feu à la bâtisse et en un rien de temps tout l’édifice devint un brasier ardent, où furent consumées bibliothèque, archives, œuvres d’art.(L’hôtel du gouvernement incendié était l’ancien marché Sainte-Anne, qui avait été construit quelques années auparavant par une association des propriétaires avoisinants. Il avait coûté £15,000. Mais le gouvernement y avait fait de grands changements. La bâtisse mesurait 342 pieds sur 50 de profondeur. Les bureaux des différents service publics furent momentanément réorganisés dans l’édifice d’un M. Hayes, situé rue Notre-Dame, près de la rue Berri).
Au dehors, la foule applaudissait sauvagement à la destruction du seul hôtel du gouvernement que Montréal ait connu. Le 27, la foule, de nouveau convoquée au champs de Mars, adopta une « résolution du peuple » demandant à la reine le rappel de lord Elgin.
Trois individus nommés Mack, Howard et Ferris, furent accusés de crime d’incendiaire, mais libérés par la cour. D’autres, impliqués dans l’affaire comme fauteurs de désordre, ne furent pas autrement inquiétés.
Les mécontents s’attaquèrent ensuite au président du Conseil, Hyppolite Lafontaine, et tentèrent de mettre le feu à sa maison. Les militaires durent être appelés; mais au cours d’une échauffourée entre les troupes et les révoltés un nommé Mason fut tué. Durant l’enquête du coroner au sujet de cette mort, on mit le feu à la maison.
Lafontaine, qui assistait à cette enquête, dut se faire escorter jusque chez lui par des militaires pour échapper aux menaçantes entreprises de la foule ameutée. Quelques jours auparavant, le fashionable hôtel Donegani, que fréquentait beaucoup la classe officielle, fut aussi incendié par une main criminelle, dit-on. Cette folle manie d’incendiaire devenait inquiétante. Pour éviter de nouveaux troubles, on décida de transférer le siège du gouvernement à Québec. C’est ainsi que Montréal perdit pour toujours l’avantage et l’honneur d’être la capitale du Bas-Canada.
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