Traversée de l’Atlantique et religion
On a déjà raconté la vie des équipages et des passagers sur les bateaux qui traversent l’océan Atlantique en route vers la Nouvelle-France. Voici un autre détail fort intéressant de ces voyages.
Sur chaque navire de dimensions moyennes ou grandes se trouve un aumônier. Chaque matin, après le lavage du pont, vient le temps de la prière. Personne n’ose refuser de prier sous peine de punition.
À la première offense, si par exemple un matelot ne prie pas avec suffisamment d’attention et de ferveur, il est condamné à payer une amende. La seconde offense mène à huit jours de régime au pain sec et à l’eau. À la troisième offense, c’est la cale qui attend le délinquant. De plus, le condamné peut être attaché par les poignets à une bouline jusqu’à la vergue et lâché brusquement à la mer.
Les membres d’équipage de certains navires sont des protestants (à l’exception du capitaine qui doit toujours être catholique). Les officiers et les aumôniers ferment les yeux devant ce fait, parce que les huguenots sont de bons matelots. Néanmoins, officiellement, il est interdit de pratiquer le culte protestant, et les contrevenants peuvent s’attirer de sérieux problèmes.
Jeanne Mance et Marguerite Bourgeoys, deux femmes parmi les plus célèbres de l’histoire de Montréal, sont, en 1658, les deux seules passagères féminines à bord d’un vaisseau où tout l’équipage, sauf 3 ou 4 hommes, est huguenot. Soir et matin, ils chantent des cantiques et des psaumes. Le capitaine ferme les yeux et les deux femmes laissent faire… Mais finalement, Jeanne Mance, dont la tolérance semble plutôt limitée, se dirige vers le capitaine et le prie de donner l’ordre à son équipage de ne plus chanter, sinon elle sera obligée de rendre compte de tout ce qui se fait à bord à qui de droit. Alors, le capitaine obéit et les chants cessent.
Cependant, selon les témoignages des aumôniers, les principaux pêchés qui se commettent sur les navires sont les blasphèmes, l’oisiveté, l’ivrognerie et le vol. La punition pour un vol est sévère: le coupable est battu à coups de cordes par tout l’équipage.
Un autre pêché assez répandu est de vouloir badiner entre des hommes d’une manière qui sent le fagot (phrase utilisée vers le début du XVIIIe siècle). La punition est simple: les coupables sont attachés sur un canon et frappés à coups de garcette. Parfois, ils pouvaient aussi se retrouver enfermés ensemble dans un sac avant d’être jetés à la mer.
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