Voyages de Wallis et de Bougainville

Voyage de Samuel Wallis et voyage de Louis-Antoine de Bougainville

Après les voyages de Tasman, on se désintéressa pendant près d’un siècle des terres inhospitalières des parages de l’Australie. En 1766, l’Amirauté britannique dépêcha Samuel Wallis et Philippe Carteret avec la mission de découvrir la Terra Australis, ou plutôt de la redécouvrir, comme le précisait l’Anglais Alexandre Dalrymple, un missionnaire érudit; il lui paraissait impossible qu’elle n’eût pas été découverte étant donné les voyages de Queiros et des autres explorateurs. Les instructions reçues par Wallis lui enjoignaient de doubler le cap Horn ou de franchir le détroit de Magellan, puis, « route à l’ouest en se maintenant à la plus haute latitude possible, de chercher les terres et les îles présumées de cette partie de l’hémisphère sud ». Sur cette Terra Australis, en admettant qu’il la découvrit, il devait « observer l’esprit, le tempérament, les goûts des habitants des terres ou des îles que vous découvrirez… Si ces îles et terres sont inhabitées, vous en prendrez possession au nom de Sa Majesté ».

A l’ouest du détroit de Magellan, une tempête sépara les deux explorateurs et Carteret, à bord du Swallow, suivant une route plus sud que Wallis, plus proche aussi de celle de Queiros, reconnut les îles Pitcairn et passa dans le sud des Tuamotou, sans remarquer un signe quelconque trahissant la présence d’une terre, bien que sa carte portait la mention: Terre vue par Queiros. Ses matelots souffrant du scorbut, il renonça à atteindre Espiritu Santo et rallia les Philippines.

Entre-temps, Wallis, traversant les Tuamotou, poursuivait sa route et créait une légende d’un nouveau genre en découvrant Tahiti. «Ceci nous emplit tous de joie… A présent nous nous considérions comme débarrassés de toutes nos misères, car nous étions presque certains de trouver sur ce vaste ensemble de terres toutes les félicités », écrit George Robertson, le capitaine de Dolphin à bord duquel se trouvait Wallis. Et, pour prouver la certitude de ses compagnons, il conclut : « Nous vîmes ce continent tant espéré ».

Il ne s’agissait pas du continent austral, mais à Tahiti les marins trouvèrent effectivement toutes les félicités, y compris celles qui ont rendu l’île fameuse et que leur réservaient les Tahitiennes « à la vue desquelles tous nos hommes ressentent une attirance folle pour rivage, tous, y compris les malades portés depuis quelques semaines sur la liste du médecin. Le tarif d’une soirée de plaisir fut vite fixé à un clou de bonne taille. Cette vie idéale continua un temps, jusqu’au jour où, note Robertson, « je venais de faire embarquer les permissionnaires dans la chaloupe quand le maître charpentier me prévint que tous les taquets avaient été retirés et que leurs clous avaient disparu. Le bosco m’informa que la plupart des clous des hamacs avaient été retirés également et que les deux tiers de l’équipage couchaient à même le pont.

Bien que par la suite Samuel Wallis ait découvert d’autres telles des îles de la Société, ainsi que Rongerik, dans les Marschall, son nom demeurera toujours associé à celui de Tahiti. Dans les annales de l’histoire des Découvertes, il est le marin qui le premier a pénétré dans le Paradis des mers du Sud et non le navigateur qui n’a pas su trouver un continent mythique.

Voyage de Louis-Antoine de Bougainville

Le Français Louis-Antoine de Bougainville mouillait à Tahiti le 6 avril 1768. Au moment où il jetait l’ancre, un charmant problème se posa à lui. En dépit de toutes nos précautions, écrit-il, « une jeune fille laissa tomber négligemment un pagne qui la couvrait et parut aux yeux de tous telle que Vénus se fit voir au berger phrygien; elle en avait la forme céleste. Matelots et soldats s’empressaient pour parvenir à l’écoutille et jamais cabestan ne fut viré avec une pareille activité. Nos soins réussirent cependant à contenir ces hommes ensorcelés ». Comme Robertson, Bougainville ressentait des sentiments divers à cette vue. « Je le demande », note-t-il dans son journal, « comment retenir au travail au milieu d’un spectacle pareil 400 Français, de jeunes marins qui depuis six mois n’avaient point vu de femmes ».

Après un séjour exquis, Louis-Antoine de Bougainville remit à la mer, cap à l’ouest et atteignit les Nouvelles-Hébrides. De là, il poursuivit, toujours cap à l’ouest, pour tenter de trouver la Terra Australis qui, sur sa carte, s’avançait en direction du nord-est vers la Nouvelle-Guinée. Les vivres vinrent à manquer et Bougainville observe : « La viande gâtée était en plus grande quantité, mais elle infectait. Nous lui préférions les rats qu’on pouvait prendre ». In n’en continua pas moins sa route.

Au cours de l’accablante traversée, un incident fit oublier un moment les rats et les ennuis. À Tahiti, à la surprise générale, le domestique d’un des naturalistes s’était montré peu empressé auprès des Tahitiennes. On découvrit qu’il s’agissait d’une jeune fille; orpheline, elle avait embarqué par goût de l’aventure. Peut-être la suite du voyage fut-elle quelque peu embarrassante pour cette nomme Jeanne Baré. Elle n’en devint pas moins la première femme à avoir fait le tour du monde.

S’obstinant à suivre la route choisie, Bougainville note : Nous sommes un degré plus à l’ouest que ne l’est la Terre du Saint-Esprit, selon M. Bellin – le cartographe qui avait traduit avec tant d’optimisme les déclarations de Queiros. Le Français découvrit la Grande Barrière de coraux, située au large de l’Australie. « Les vigies aperçurent du haut des mâts de nouveaux brisants », écrit-il… « … On n’en apercevait pas la fin… Nous étions assurément bien fondés à croire que la Terre Australe du Saint-Esprit n’était autre que l’archipel des Grandes Cyclades, qui Queiros avait pris pour un continent, et présenté sous un point de vue romanesque ». Après mûre réflexion, Bougainville mit cap au nord. Ne croyant guère à l’existence du détroit de Torrès, il se faufila le long de l’extrémité est de la Nouvelle-Guinée, puis, après avoir longé la côte nord de l’île, il mit le cap à l’ouest pour regagner les Indes orientales et la France. En route, il doubla le Swallow de Carteret, qui avançait péniblement. « il a dû souffrir dans une si mauvaise embarcation! » écrivit Bougainville dans son journal. Cependant la solution du problème de la Terra Australis sera fournie quelques années plus tard par un autre Anglais, qui ne disposait lui aussi que de navires médiocres. Il s’agit de James Cook qui effectua deux voyages, l’un à bord de l’Endeavour, l’autre du Resolution.

Voyages d’Abel Tasman

Au XVIIe siècle, les navires lancés à la recherche de la Terra Australis étaient entrés dans le Pacifique par le détroit de Magellan. Les premières incursions à partir de l’ouest furent réalisées par les Hollandais. En fait, dès le début du XVIIe siècle, ceux-ci disposaient de bonnes bases aux Indes orientales. En outre, à l’époque, les capitaines hollandais avaient adopté pour se rendre en Extrême-Orient une nouvelle route maritime. Au lieu de profiter des vents du sud-ouest et de la mousson pour rejoindre les Indes orientales en touchant aux Indes, ils se laissaient porter par les grands frais, ces vents d’ouest dominants, jusqu’à la longitude de Java, puis remontaient cap au nord. C’est en partant, en 1605, de Bantam (Java) que Guillaume Janszoon, après avoir exploité la côte sud de la Nouvelle-Guinée, s’engagea dans le golfe de Carpentarie; il fut de ce fait le premier Européen à découvrir l’Australie, que les Hollandais appelèrent la Nouvelle-Hollande.

En 1642, lorsque Abel Tasman s’engagea dans la première expédition sérieuse en vue d’étudier la nature de la Nouvelle-Hollande, les Hollandais avaient déjà reconnu partie du littoral nord, toute la côte ouest et la côte sud jusqu’au 133e méridien est. Cependant, des points obscurs subsistaient : les Hollandais ignoraient la découverte par Torrès d’un détroit entre le cap York et la Nouvelle-Guinée. Le sud du golfe de Carpentarie demeurait inexploré et d’aucuns en déduisaient qu’il constituait un détroit faisant de la partie occidentale de l’Australie une simple île. La côte orientale de ce détroit était, pensait-on, un vaste promontoire de la Terra Australis.

Tasman, appareillant de Batavia (l’actuelle Djakarta), rallia l’île Maurice, piqua cap au sud à partir du 49e parallèle, puis, choisissant une route de quelques degrés plus nord que le plein est, il fit voile, son sillage effaçant de la carte l’hypothétique Terra Australis dans ce quart de l’océan Indien. Un après-midi, il arriva en vue d’une terre, qui devait plus tard recevoir son nom, la Tasmanie, et, sur son ordre, e maître charpentier du bord franchit à la nage les rouleaux pour prendre possession de cette terre au nom de la Compagnie hollandaise des Indes occidentales, en érigeant un pieu portant une inscription. Tasman ne se savait pas en présence d’une île mais, poursuivant se route cap à l’est, il démontra que l’Australie en était une. Grâce à Tasman, le continent austral se rétrécissait à nouveau.

En découvrant la Nouvelle-Zélande, il crut qu’il se trouvait en présence d’un promontoire de la Terra Australis, d’un littoral qui s’élongeait en direction du Sud-Est et du cap Horn. Un voyage ultérieur lui permit de reconnaître le fond du golfe de Carpentarie mais, comme d’autres navigateurs qui l’avaient précédé, les écueils et les hautfonds du détroit de Torrès lui firent croire que l’Australie septentrionale était rattachée à la Nouvelle-Guinée.

D’après L’Âge des Découvertes par John R. Hale et les Rédacteurs des Collections Time-Life, 1967.

Pour en apprendre plus :

Rêve ta vie en couleur, c'est le secret du bonheur. (Walt Disney). Photographie par Megan Jorgensen. Plage de Nassau, Bahamas.
Rêve ta vie en couleur, c’est le secret du bonheur. (Walt Disney). Photographie par Megan Jorgensen. Plage de Nassau, Bahamas.

Laisser un commentaire