Les salaires au Québec et les grèves

Les salaires au Québec et les grèves

En 1893, M. Narcisse Rosa publia un livre sur la construction navale. En le lisant on voit qu’il ne régnait pas toujours une entente parfaite entre les constructeurs et les charpentiers.

En passant, remarquons que M. Narcisse Rosa habitait à Saint-Roch. Il demeurait rue du Roi.

Il y eut donc des bisbilles à propos des gages dans les chantiers maritimes. En 1841, les ouvriers du chantier de M. John Munn, qui gagnaient alors 3 schillings et 18 sous par jour, demandèrent 4 schillings, mais le patron ne voulut pas leur accorder ce traitement. La grève a duré 5 semaines et les charpentiers de ce chantier durent retourner à l’ouvrage sans avoir rien obtenu. Qui plus est, forts du succès de M. Munn, tous les autres chantiers baissèrent les salaires à 3 schillings et 18 sous. C’était un désastre pour les ouvriers.

Mais ce n’était qu’un commencement. En 1844, les appointements des charpentiers tombèrent à 40 sous par jour. À l’époque, un gros pain de 6 livres se vendant 40 sous, il ne restait pas grand chose aux ouvriers pour faire vivre leurs familles.

Après 1844, le salaire moyen des calfats et des charpentiers a augmenté en raison de la demande accrue de main-d’œuvre. Le salaire était de 5 à 7 schillings par jour. Puis vers 1850 débute la période la plus active de l’industrie navale. À Québec, on construisait jusqu’à 60 navires par an. Or la main-d’œuvre était rare, de plus les patrons se faisaient une concurrence effrénée. On offrait donc de hauts salaires pour attirer les ouvriers. Les gages montèrent jusqu’à $2.00 et $4.00.

Malheureusement, cet âge d’or n’a pas duré. Vers la fin des années 1850, les patrons reviennent à leurs anciens prix.

Une deuxième grève a lieu en 1857, toujours en raison des salaires. Cette fois, elle éclate aux chantiers de M. Isidore Samson, à Lévis. Cette grève fut aussi marquée par un incident malheureux: un ouvrier qui persistait à travailler eut la visite de ses compagnons grévistes qui le descendirent brusquement des échafaudages, lui infligeant des blessures dont il mourut 3 jours plus tard.

Les autorités interviennent et les grévistes retournent au travail.

En 1878 a lieu la plus importante et la pire grève de toutes. C’était une grève générale qui toucha tout ce corps de métier, tant à Québec qu’à Lévis. Des milliers d’ouvriers y ont prit part.

Comme d’habitude, ceux qui ne voulaient pas suivre les grévistes étaient impitoyablement chassés des chantiers.

À l’époque, il n’y avait pas encore de syndicats ouvriers. La grève durait déjà depuis des semaines lorsque des citoyens de Québec interviennent entre les patrons et les employés, mais en vain.

Les ouvriers ne bougent pas, les patrons demandent l’aide des autorités, la garnison de Québec est appelée à veiller sur l’ordre dans les rues de la ville. Les familles ouvrières n’ont plus de quoi alimenter leurs enfants et la grève dégénère en révolte populaire.

Une foule va dévaliser les entrepôts de la maison J.-B. Renaud. Les gens s’emparent de tout ce qu’ils peuvent emporter. Le maire de Québec, M. Robert Chembers, appelle alors les militaires. La cavalerie arrive et somme les grévistes de se retirer. Ils ne l’écoutent pas. Alors le maire lit le Riot Act trois fois. Les gens ne se dispersent pas. Certains commencent à insulter les militaires et à leur lancer des pierres. C’est alors que l’officier en chef donne l’ordre de faire feu. Un des grévistes tombe sous les balles. Ainsi se termine cette échauffourée, ainsi que la grève.

On voit que les trois grèves de charpentiers ont échoué. C’était la lutte du pot de terre contre le pot de fer et rien ne changea jusqu’à ce que les syndicats prennent la parole.

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Salaires au Québec.  Transformation du minerai dans une usine à Rouyn-Noranda, Abitibi, en 1940. Image libre de droit.

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