C’est en passant par Varennes

C’est en passant par Varennes

Cette jolie chanson de marche – une adaptation canadienne d’En passant par la Lorraine, avec mes sabots – est depuis longtemps populaire au Canada, comme elle l’est en France, parmi les soldats, les étudiants et les artistes. On la chanta au Déjeuner Celtique donné, en 1884, sous le patronage d’Ernest Renan. Elle a souvent figuré, depuis, aux programmes des vedettes de l’Opéra. Au Canada, on la chante aussi dans les collèges et les écoles, et dans les réunions universitaires, mais elle est peu connue dans le vrai terroir.

Elle semble nous être venue de France plutôt tard, avec le répertoire de chansons modernes que les visiteurs et les chansonniers ont introduit chez nous. La version que voici fut, en effet, communiquée à M. E.-Z. Massicotte par M. Tison, alors au Palais de Justice à Montréal, dont le grand-père – un bon chanteur, paraît-il – était venu de France s’établir au Canada, au temps de la Conquête.

Cette chanson, toutefois, était déjà assez ancienne au temps de son passage en Amérique, parce que sa forme et son contenu avaient alors déjà eu le temps de se ramifier en plusieurs variations.

La trentaine de versions françaises (publiées par Rolland, Rujeaud, Tarbé et Orain) ne s’accordent guère sur le nom de l’endroit figurant au premier vers: La Lorraine, Rennes, ou Varennes, etc.

La fleur fatidique de la fin est une verveine, ou une marjolaine, ou une rose de marjolaine, comme dans notre chanson. Le refrain et les mélodies varient aussi; ici l’on chante « Avec mes sabots, dondaine », et là, Tir’ton joli bas de laine … car on le verra. La version française publiée par Orain pour l’Ille-et-Vilaine a le même refrain que la canadienne.

De toutes les variantes la plus importante, bien qu’elle soit la moins connue de toutes, est intitulée « Les sabots d’Anne de Bretagne ». Elle fait allusion au mariage de la princesse bretonne qu’épousa le roi de France, en 1491. Elle remonterait donc approximativement à cette date.

Pour pousser plus loin la comparaison entre Les sabots d’Anne de Bretagne et C’est en passant par Varennes, je cite:

C’était Anne de Bretagne, Avec des sabots, revenant de ses domaines, En sabots, mirlitontaine, Ah! Ah! Ah! Vive les sabots de bois.

L’on vit trois beaux capitaines Offrir à leur souveraine Un joli pied de verveine. « S’il fleurit tu seras reine. » Elle a fleuri, la verveine; Anne de Bretagne fut reine, Les Bretons sont dans la peine; Ils n’ont plus de souveraine.

en passant par Varennes
En passant par Varennes.

Texte de la chanson :

C est en passant par Varennes,
Cach ton, tire, cach ton bas,
J ai rencontré trois capitaines.
Cach ton, tire, cach ton bas,
Cach ton joli bus de laine.
Car on le verra.
J’ai rencontré trois capitaines.
Ils m’ont traité de vilaine.
Je ne suis pas si vilaine.
Puisque le fils du roi m’aime.
Il m’a donné pour étrennes
Un beau violon d’ébène.
Une rose de marjolaine
Si elle flétrit, je s rai vilaine.
Si elle fleurit, je serai reine.

Lire aussi :

note musicale varennes
Notes musicales de la chanson

(Texte paru dans la revue Moderne, #15, mars 1940).

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