Histoire de la Nouvelle-France au milieu du XVIIe siècle
D. Quelle association se fit-il, en l’année 1640, pour le soutien de la religion catholique en Canada, et pour la conversion des sauvages ?
R. Plusieurs personnes, tant ecclésiastiques que laïques, animées d’un zèle religieux, s’associèrent sous le nom de Compagnie de Montréal. L’année 1641, M. Chaumeday de Maison-Neuve, un des associés, y amena plusieurs familles de France, et arriva à Québec au mois de septembre ; comme la saison était trop avancée pour se rendre de suite dans l’île de Montréal, où il n’y avait pas d’habitation, il fut obligé d’attendre au printemps suivant. Le débarquement se fit le 17 mai 1642, sur la pointe nommée depuis Pointe-à-Cailière, en présence de M. de Montmagny, gouverneur, et du supérieur des Jésuites, qui célébra aussitôt l a messe dans une petite chapelle, qui avait été bâtie pour cette fin. Bientôt après, une nouvelle recrue arriva de France, puis une troisième, l’année suivante. L’établissement fut nommé Ville-Marie, prit la forme d’un commencement de ville et fut entouré d’une palissade de pieux debout.
D. Que fit le gouverneur-général pour empêcher les Iroquois de pénétrer dans la colonie ?
R. Il fit bâtir un fort à l’entrée de la rivière de Richelieu. Ce fort fut achevé en peu de temps quoique pussent faire sept cents Iroquois, qui vinrent fondre sur les travailleurs, et qui furent repoussés avec perte. Ces ennemis communs de tous les autres habitants du Canada, assurés d’être soutenus par les Hollandais de Manhattan (New-York), qui commençaient à leur fournir des armes et des munitions, et à qui ils vendaient les pelleteries qu’ils avaient enlevées aux alliés des Français, ne cessaient pas leurs courses et leurs brigandages. Ils prirent le Pères Jésuites, qui se rendait chez les Hurons, et le P. Bressani sur le lac Saint-Pierre. Ces religieux furent horriblement maltraités ; tous ceux qui les accompagnaient furent tués ou faits prisonniers. Vers le même temps, on reçut du pays des Hurons les nouvelles les plus désastreuses ; les Iroquois détruisaient par le feu des bourgades entières, et en massacraient tous les habitants.
D. Qu’arriva-t-il en l’année 1615 ?
R. M. de Montmagny invita les Iroquois, les Hurons et les Algonquins à se rendre aux Trois-Rivières, pour y traiter de la paix. La paix ayant été conclue, on vit, l’hiver suivant, les Iroquois, les Hurons et les Algonquins chasser ensemble aussi paisiblement que s’ils eussent été de la même nation. Mais la paix ne fut pas de longue durée ; car les Iroquois attaquèrent, l’une après l’autre, les bourgades huronnes et en massacrèrent les habitants. Plusieurs missionnaires furent enveloppés dans ces massacres, entre autres les Pères Gabriel Lallemant, Garnier, Daniel et de Brébeuf.
D. Que firent les Iroquois après l’anéantissement ou sa dispersion des Hurons ?
R. Ils ne regardèrent plus les forts et les retranchements les Français comme des barrières capables de les arrêter. Ils parcoururent le pays et se répandirent, en grandes troupes, dans les environs des habitations. Un de leurs partis s’étant approché des Trois-Rivières, M. Duplessis, qui y commandait, voulut marcher contre eux : il fut tué dans le combat, et sa mort donna un nouveau relief aux armes des Iroquois. Ils n’étaient pas animés contre les seuls Français, mais encore contre toutes les tribus sauvages qui avaient porté secours ou donné asile aux Hurons. En 1651, ils pénétrèrent chez les Altikamecs et autres sauvages du nord, et ne laissèrent pas un village dont ils n’eussent égorgé ou dissipé les habitants.
D. Par qui M. de Montmagny fut-il remplacé dans le gouvernement du Canada ?
R. Par M. d’Aillebout, commandant aux Trois-Rivières, et celui-ci par M. de Lauzon en 1651. À peine ce dernier fut-il arrivé dans son gouvernement qu’il comprit la nécessité d’opposer une digue à ce torrent; mais il n’avait amené aucun secours de France, et la colonie était loin d’avoir des forces suffisantes pour rétablir la sûreté et la tranquillité.
D. Qu’arriva-t-il en l’an 1653 ?
R. Deux cents Iroquois surprirent, dans l’île de Montréal 20 Français, et les enveloppèrent de toutes parts. Ces derniers firent si bonne contenance, et se défendirent avec tant de résolution, qu’ils mirent les barbares en fuite après en avoir tué un grand nombre. Dans le même temps, 500 Agniers s’approchèrent des Trois-Rivières, et tinrent ce poste bloqué pendant quelque temps.
D. Par qui M. de Lauzon fut-il remplacé dans le gouvernement du Canada ?
R. Il fut remplacé par M. d’Argenson, qui débarqua à Québec, le 11 juillet 1658. Le lendemain de son arrivée, il fut assez surpris d’entendre crier aux armes, et d’apprendre que des Algonquins venaient d’être massacrés par des Iroquois, sous le canon du fort. Il détacha aussitôt 200 hommes français et sauvages, pour courir après ces barbares, mais ils ne purent être atteints. Peu de temps après, des Agniers vinrent pour surprendre le poste des Trois-Rivières ; ils envoyèrent huit hommes sous prétexte de parlementer, mais pour observer l’état de la place ; ils furent emprisonnée et on en fit bonne justice, ce qui procura quelque repos à la colonie.
D. Quelle consolation la colonie reçut-elle au milieu de tous ces désastres ?
R. Ce fut de recevoir Monseigneur François de Laval, en qualité de vicaire apostolique. Il débarqua à Québec le 6 juin 1659, accompagné de plusieurs prêtres séculiers. D’autres prêtres le vinrent joindre les années suivantes, et, à mesure qu’ils arrivaient, ils » furent mis en possession des cures, dont les Récollets et les Jésuites avaient été chargés jusque-là, parce qu’ils étaient les seuls prêtres qu’il y eût en Canada, si l’on en excepté l’île de Montréal. Dès 1647, le Séminaire de Saint-Sulpice de Paris avait acquis, par achat, tous les droits des premiers possesseurs de cette île. L’abbé de Quélus, y vint cette année, avec plusieurs prêtres, pour y fonder un Séminaire. Toute la compagnie applaudit à cette entreprise, qui fut bientôt suivie de l’Hôtel-Dieu, que M. de la Dauversière et Madame de Bouillon contribuèrent le plus puissamment à fonder. La congrégation de Notre-Dame avait été instituée, quelques années auparavant, par Mademoiselle Marguerite Bourgeois
D. En quel état était la colonie pendant les années 1660 et 1661?
R. Ne recevant aucun secours de France, elle semblait ne se soutenir que par une espèce de miracle; car les habitants ne pouvaient s’éloigner des forts sans courir risque d’être massacrés ou enlevés. Sept cents Iroquois, après avoir défait un grand parti aucun secours de France, elle semblait ne se soutenir que par une espèce de miracle ; car les habitants ne pouvaient s’éloigner des forts des forts sans courir risque d’être massacrés pu enlevés et de Sauvages, tinrent Québec comme bloqué, pendant plusieurs mois. Ils se retirèrent vers l’automne ; mais, au printemps suivant, plusieurs partis reparurent en différents endroits de la colonie et y tirent de grands dégâts. Un prêtre du Séminaire fut tué en revenant de dire la messe à la campagne. M. de Lauzon, sénéchal de la Nouvelle-France, et fils du précèdent gouverneur, avec plusieurs personnes de considération, eurent le même sort Enfin, depuis Tadoussac jusqu’à Montréal, on ne voyait que des traces sanglantes du passage de ces féroces ennemis.
D. Quel autre fléau désola la colonie dans le même temps ?
R. C’était une espèce de coqueluche qui se tournait en pleurésie et qui attaquait indistinctement les Français et les Sauvages, mais particulièrement les enfants. Pendant que ce terrible fléau ravageait la colonie, le baron d’Avaugour arriva de France pour remplacer M. d’Argenson dans le gouvernement général du Canada. Son premier soin fut de visiter tous les postes de son gouvernement ; après cette visite, il écrivit en France pour demander les troupes et les munitions qui lui paraissaient nécessaires ; il reçut 400 hommes avec plusieurs officiers de mérite (1662). L’arrivée de ce renfort causa la plus grande joie dans Québec.
D. Par quoi cette joie fut-elle troublée ?
R. Par la dissension qui éclata entre le gouverneur et l’évêque au sujet de la traite de l’eau-de-vie avec les Sauvages. Le prélat prit le parti de passer en France pour porter ses plaintes au pied du trône. Le roi lui donna gain de cause ; et il y a lieu de croire que ce fut à s a demande que d’Avaugour fut rappelé.
Voir aussi :
- La bataille de Long-Sault