Mort, sépulture et deuil chez les Amérindiens
À l’approche de ces derniers moments consacrés par la piété de tous les siècles, et par les vœux que chacun formait de mourir entre les mains des personnes qui leur étaient les plus chères, qui recueillissent leurs derniers soupirs et qui leur fermassent les yeux, la piété des Sauvages se signale aussi. Mais la sotte crainte qu’ils ont de ne pouvoir pas bien fermer les yeux et la bouche à leurs malades, et qu’ils n’en restent défigurés après leur mot, rend leur piété cruelle pendant qu’ils sont à l’agonie.
L’attention qu’ils ont à leur rendre ces devoirs hâte la mort à plusieurs, sans que leur tendresse en soit alarmée, parce qu’ils n’en espèrent plus rien, ou même parce qu’ils croient abréger leurs douleurs. J’ai eu quelquefois de la peine à arrêter des mères, qui se rendaient aussi les homicides de leurs enfants, que je ne pouvais pas croire qu’elles n’aimassent extrêmement.
À tout ce que j’ai dit du sentiment des Américains sur l’immortalité de l’âme, je crois devoir ajouter comme une nouvelle preuve tout ce qu’ils ont coutume de pratiquer envers leurs morts. Le détail que j’en vais faire sera une espèce de démonstration plus que suffisante d’une opinion qui, ayant été reçue de tous les peuples les plus barbares, ne devrait point trouver de contradicteurs. Mais la corruption du cœur est venue à un tel excès qu’elle fait regarder aux hommes vicieux comme vrai ce que leur dépravation leur fait souhaiter pour jouir plus en paix de leurs vices. Rien n’autorisant plus la licence que la persuasion où ils veulent être que tout périt avec le corps; car alors ils croient pouvoir satisfaire leurs passions sans remords. Ils se flattent qu’ils n’ont point à craindre d’être punis dans l’éternité, selon la juste mesure de leurs crimes.
Non seulement les Américains conviennent avec tous les autres peuples plus connus dans les honneurs qu’ils rendent aux morts, et dans les motifs qui les leur font rendre, mais ils sont encore si conformes en ce point aux usages des Anciens que je me trouve ici très embarrassé de l’ordre que je dois donner à ma relation par la multitude des autorités qui font sentir cette convenance, et qui doivent naturellement produire de la confusion.
C’est pour tâcher d’éviter cette confusion que je vais raconter simplement ce qu’ils ont coutume de pratiquer en ces occasions, me contenant de m’étendre un plus plus sur quelques points principaux qui méritent le plus d’attention :
- Premiers soins rendus au cadavre
- Manière singulière d’embaumer les corps
- Nénies et manière de pleurer les morts
Festin pour les morts
Différents usages de la déposition des corps.
Sentiment des païens au sujet des mânes
Du deuil
Fête générale des morts
(Tiré du Mœurs des Sauvages Américains, comparés aux mœurs des premiers temps, par Joseph-François Lafitau)