Monnaie de cartes

Monnaie de cartes en Nouvelle-France

Le Canada exportait beaucoup de fourrures en France; mais il n’en recevait pas tout l’équivalent en valeurs de circulation. Les marchandises d’échanges, achetées dans la métropole et les profits réalisés par les actionnaires français de la Compagnie absorbaient une bonne part des revenus de la traite. Le pays importait d’ailleurs presque toutes ses marchandises fabriquées.

De tout cela il était résulté une extrême rareté du numé raire. Si l’on s’en rapporte à un mémoire de l’intendant Raudot, il y avait à peine en circulation trente livres pour chaque habitant, soit à peu près $6.00 de notre monnaie courante.

Pour suppléer à l’insuffisance de l’argent en cours que les importations de France drainaient constamment dans la mère patrie, le gouvernement de la colonie, à différentes époques, avait eu recours à la monnaie de cartes. Le roi désapprouva d’abord cette mesure d’ur gence, nécessitée pourtant par les circonstances; mais il finit par la tolérer et même l’autoriser. En 1711, on fit une émission de 450 000 livres pour remplacer en partie d’anciennes séries qui devaient être brûlées. On donna comme motif de cette mesure les grands travaux entrepris pour mettre la colonie en état de repousser les Anglais qui s’apprêtent à l’envahir.» Il faut croire que les travaux entrepris furent insuffisants puisque cette même année Port Royal passait pour toujours au pouvoir des Anglais. En 1729, le roi lui-même ordonna une nouvelle émission de 400 000 livres pour les grands besoins de la colonie.

Cette politique d’inflation des valeurs d’achats devait être suivie jusqu’à la cession. Elle aboutit à la banqueroute presque totale des obligations, contractées par la couronne, entraînant la ruine des habitants, après avoir enrichi toute la fripouille que protégeait le cynique intendant François Bigot.

La mise en circulation de ces petites cartes de format irrégulier, d’un dessin peu compliqué et d’un libellé vraiment trop simple, offrait quelque danger. Souvent écrites à la main, elles étaient faciles à contrefaire. Il est surprenant qu’elles ne le furent que rarement. À notre connaissance les archives publiques en mentionnent quatre cas, qui se produisirent de 1730 à 1742. Un nommé LeBeau est, le premier, accusé d’avoir forgé de la monnaie de cartes (1730). On ignore les suites de cette affaire. L’année suivante, un nommé Pelletier est condamné à la prison, puis au bannissement de la colonie pour la même offense. En 1736, un jugement rendu par l’intendant Hocquart fait monter sur l’échafaud Louis Mallet et sa femme Marie Moore, pour fabrication et exposition de fausse monnaie.»

Leurs enfants furent renvoyés en France. En 1742, Jean Chassé dit Bourguignon, surnommé « la joue percée », est pendu en effigie par contumace, pour majoration et falsification de monnaies et billets ». La sévère sanction des lois empêcha sans cloute de plus nombreux abus de se produire.

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Monnaie de cartes
Les fausses opinions ressemblent à la fausse monnaie qui est frappée d’abord par de grands coupables et dépensée ensuite par d’honnêtes gens qui perpétuent le crime sans savoir ce qu’ils font. (Joseph de Maistre). Photo d’Histoire du Québec.

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