Restauration de la monarchie en France

La Restauration et la politique extérieure de la France au XIXe siècle

Louis XVIII : Le retour des Bourbons

La restauration de la monarchie, avec Louis XVIII (1814-1824), ne provoque pas de réactions hostiles.

Reconnu roi par les proches de l’Empereur après ses adieux de Fontainebleau, le comte de Provence monte sur le trône sous le nom de Louis XVIII. Frère de Louis XVI, il assure la continuité de la lignée des Bourbons. Soucieux de ne pas rejeter tout l’héritage de la période révolutionnaire, il fait rédiger une Charte organisant le nouveau régime et inspirée du modèle anglais.

Il s’en fuit en Belgique dès le retour de Napoléon, et rentre à Paris le 8 juillet 1815, peu après la seconde abdication de l’Empereur (22 juin).

La Charte de 1814

Si le terme de Constitution disparaît, la Charte organise de fait une monarchie constitutionnelle, le roi disposant des pouvoirs exécutif et militaire et de l’initiative des lois, un Parlement est constitué de la Chambre des Pairs (composée de membres nommés et héréditaires) et de la Chambre des Députés élus (mais dans des conditions très restrictives, réduisant à 100 000 le nombre des électeurs et à 15 000 le nombre d’éligibles). Elle discute et vote les lois et le budget, mais le roi peut, par ordonnance, se passer de ses services.

Les « Ultras » au pouvoir

À la suite des « Cent Jours », la vie politique française est marquée par l’opposition entre les « ultra-royalistes » et les partisans de la Charte. Ces derniers, favorables à l’idée de Constitution, comprennent deux tendances : une aile conservatrice (de Broglie, Guizot, Victor Cousin) composée de notables fortunés (aristocrates, grand bourgeois ou universitaires), et une aile libérale ou « indépendante », attachée à la liberté et aux droits individuels (Casimir Périer, les Laffitte, La Fayette, Carnot, Odilon Barrot), et hostile à Louis XVIII et aux ultra royalistes.

Les « Ultras », quant à eux, reprochent à la Charte son existence même, qui leur apparaît comme une limite à l’absolutisme royal et un héritage de l’épisode révolutionnaire. S’appuyant sur la France rurale, soutenus par le clergé et ayant à leur tête le futur Charles X (alors Comte d’Artois), ils triomphent à tel point aux élections d’août 1815 (en obtenant 350 députés sur 398) que Louis XVIII parle de « Chambre introuvable ».

Désireux d’entreprendre une contre-révolution, surtout après les « Cent jours », ils organisent une « Terreur blanche ». Il s’agit d’éliminer de tous les organes de pouvoir et de l’administration les anciens révolutionnaires ou bonapartistes, et d’extirper du pays tout l’héritage politique et idéologique de cette période.

Les « Ultras » obtiennent la condamnation à mort des généraux ralliés à Napoléon après son retour (Ney et La Bédoyère sont exécutés, Brune assassiné par une foule royaliste, alors que Soult réussit à se cacher); ils votent la « loi de Sûreté Générale » (31 octobre 1815), qui supprime la liberté individuelle et permet d’emprisonner sans jugement les suspects : la création de « cours prévôtales » conduit à l’arrestation de 70 000 personnes.

Par ailleurs, une agitation royaliste populaire, orchestrée par des groupes organisés d’ « ultras », ou par des catholiques intransigeants, conduit aux massacres de Bonapartistes (Marseille, Avignon, Toulouse) et de protestants (Nîmes).

Devant ces excès, Louis XVIII suit les conseils de don ministre de la Police Decazes qui prône la modération et l’amène à dissoudre la « Chambre introuvable » (5 septembre 1816); la nouvelle chambre ne comprend plus qu’un tiers d’ « Ultras ».

L’assouplissement du régime

Le gouvernement, bien que présidé par un grand aristocrate, le duc de Richelieu, s’éloigne alors de plus en plus nettement du parti « ultra ».

Ainsi, en 1817, une loi électorale préparée par le ministre de l’Intérieur Lainé prévoit que les votes auront lieu dans les chefs-lieux de département, ce qui défavorise la noblesse et le clergé des campagnes, et avantage la bourgeoisie urbaine.

De plus, en mars 1818, la loi militaire Gouvion-Saint-Cyr supprime le privilège des nobles qui leur réserve le rang d’officier dans l’armée.

L’élection de nombreux libéraux en 1817 et 1818 (Casimir Périer, La Fayette) aboutit à la démission du duc de Richelieu et à la formation d’un gouvernement modéré favorable à la monarchie constitutionnelle, présidé par le général Dessolle et dominé par Decazes.

Celui-ci fait nommer 60 nouveaux membres de la Chambre des Pairs favorables au gouvernement, change les hauts fonctionnaires qui lui sont hostiles, libéralise le statut de la presse (Loi de Serre, mai 1819). Mais la montée de la gauche libérale, aux élections partielles de 1819, puis l’assassinat, le 13 février 1820, du duc de Berry, neveu et successeur potentiel de Louis XVIII, provoquent une réaction des « Ultras » : ils obtiennent du roi le départ de Decazes (bien que celui-ci ait tenté de se rapprocher d’eux) et le retour du duc de Richelieu (20 février 1820).

Le retour des « Ultras »

Le nouveau gouvernement adopte alors une politique très conservatrice : il décide que la majorité des députés sera élue au scrutin d’arrondissement favorable aux grands propriétaires fonciers, les électeurs les plus imposés votant deux fois (une première fois dans l’arrondissement, une seconde fois au chef-lieu du département); par les lois de mars 1820, on en revient aux restrictions des libertés de la presse, avec le rétablissement de l’autorisation préalable et de la censure, alors que l’Université est étroitement contrôlée. De plus, la suspension de la liberté individuelle permet d’emprisonner, sans jugement pendant trois mois, tout individu suspect.

La naissance du fils posthume du duc de Berry, le duc de Bordeaux (29 septembre 1820) renforce par ailleurs la combativité des « Ultras », qui remportent une victoire écrasante aux élections suivantes, alors que l’un de leurs leaders, Villèle, succède au duc de Richelieu à la tête du gouvernement en décembre 1821. L’opposition parlementaire étant modérée et inefficace, la contestation au régime s’organise clandestinement et prend la forme de sociétés secrètes comme la Charbonnerie, influencée par les carbonari italiens.

Celle-ci tente d’organiser une insurrection qui échoue totalement (La Rochelle, Saumur, Colmar, Belfort). La répression qui s’ensuit conduit en particulier à l’exécution à Paris, le 21 septembre 1822, des quatre « sergents de la Rochelle » qui apparaissent comme les martyrs de l’opposition libérale. Celui-ci doit cependant rester encore de longues années sans grande influence sur un pouvoir qui se durcit encore à la mort du roi.

Villèle

Le comte Jean-Baptiste de Villèle (1773-1854) a fait fortune à la Réunion avant de revenir en France en 1807. Membre de la société secrète des Chevaliers de la foi, il s’oppose à l’Empire, puis il est élu député de la Chambre introuvable. Chef du parti «ultra », il est ministre du duc de Richelieu en 1820, démissionne en critiquant son « libéralisme », avant de revenir au pouvoir fin 1821, d’abord comme ministre des finances, puis comme président du Conseil. À nouveau ministre sous Charles X, il a alors affaire à l’opposition de l’extrême droite et à celle des libéraux et se retire en 1828.

Louis-Philippe Ier : La monarchie de juillet (1830-1848)

Porté au pouvoir par l’insurrection de juillet, Louis-Philippe, le nouveau souverain doit affronter l’opposition des partisans de Charles X et surmonter la division de ses propres défenseurs.

Louis-Philippe doit faire face à l’opposition des milieux royalistes dits « légitimistes », partisans de Charles X, et à la division des défenseurs du nouveau régime, entre le « parti du Mouvement » qui veut développer la démocratie politique (La Fayette, Odilon, Barrot, Laffitte) et celui de « la Résistance » qui refuse toute concession (Guizot, Casimir, Périer).

Aussi Louis-Philippe est-il attiré par le pouvoir personnel, malgré ses idées libérales et son mode de vie, plus proche de celui de la grande bourgeoisie que de celui de la haute noblesse.

Cela s’explique aussi par l’instabilité du début de son règne : malgré la présence au gouvernement de ministres « progressistes » (Périer, Laffitte, de Broglie) l’agitation se poursuit dans les rues de Paris; les différends entre les partisans du « Mouvement » et ceux de la « Résistance » conduisent à une succession de ministères de tendances opposées (Laffitte, puis Casimir Périer en 1831, de Broglie en 1834-1835). Par ailleurs, l’opposition légitimiste est active partout dans le pays et principalement dans le Midi et en Bretagne : la veuve du duc de Berry tente même d’organiser un soulèvement armé (novembre 1832).

De plus, les difficultés économiques qui sont en partie à l’origine de la révolution de juillet 1830, n’ont pas disparu pour autant (crise des métiers traditionnels, augmentation du chômage et prix du pain, baisse des salaires).

Les mouvements populaires

Des troubles graves éclatent à Lyon en 1831. A Paris, l’enterrement du général Lamarque, haute figure républicaine, tourne à l’émeute ; les manifestants, qui ont brandi le drapeau rouge et dressé des barricades, sont pourchassés par l’armée jusque dans le cloître Saint-Merri (5-6 juin 1832). Puis, face aux tentatives d’expression républicaine (journaux, associations, sociétés secrètes), une loi d’avril 1834 interdit la création de sections locales; cela provoque une nouvelle insurrection à Lyon (9-12 avril) et à Paris, où l’action rapide et brutale du général Bugeaud (massacre de la rue Transnonain) stoppe le mouvement.

Le roi est même l’objet d’une tentative d’assassinat (28 juillet 1835) qui conduit à un durcissement de la législation répressive contre la presse et les organisations républicaines ou socialisantes.

De ce fait, les principaux journaux ne peuvent être que favorables au régime, malgré leur diversité : le Journal des Débats est le plus proche du roi (Guizot, Molé), « Le constitutionnel » animé par Thiers prône la monarchie parlementaire, alors que « Le Siècle » semble plus progressiste (Lafitte, Odilon Barrot).

Ces divergences, aggravés par des rivalités de personnes, prennent une dimension nouvelle durant le ministère du comte Molé, qui laisse la réalité du pouvoir au roi. Thiers, Odilon Barrot, Dupin, Guizot, prennent la tête d’une coalition de députés hostiles au président du Conseil. Celui-ci fait dissoudre l’Assemblée. Mais les élections sont favorables aux ennemis de Molé, qui démissionne (8 mars 1839).

Thiers et Guizot

Peu de temps après, une nouvelle émeute parisienne amène la formation d’un ministère Soult (mai 1839), toujours trop favorable au roi, aux yeux de la nouvelle majorité de la Chambre (1er mars 1840). Refusant de s’appuyer sur les radicaux républicains (favorables à l’élargissement du droit de vote), et sans politique sociale face à l’agitation ouvrière, Thiers cherche surtout à flatter l’orgueil national (retour des cendres de Napoléon, politique anti-anglaise). Ces menaces amènent Louis-Philippe à rappeler Soult pour présider un gouvernement dominé par la personnalité de Guizot (29 octobre 1840).

Celui-ci fait preuve d’une grande habilité pour se concilier les bonnes grâces du roi et de l’Assemblée, maintenir la paix extérieure, rassurer la bourgeoisie et ne pas déplaire aux légitimistes. Mais son immobilisme déplaît aussi bien à ceux qui espèrent une évolution vers plus de libéralisme, qu’aux milieux catholiques et légitimistes réclamant la « liberté d’enseignement » (remise en cause par la « loi Guizot » de 1833).

Après la mort accidentelle en 1842 du fils de Louis-Philippe dont l’opposition libérale attendait beaucoup, et le refus de Guizot de faire désigner la duchesse d’Orléans, favorable « au Mouvement » comme éventuelle régente, l’évolution politique semble être bloquée.

La crise finale

Or, une nouvelle crise économique, des scandales touchant de hauts dignitaires et le désir de la moyenne bourgeoisie d’obtenir le droit de vote par la baisse du cens électoral accumulent les oppositions au régime.

L’interdiction du banquet qui doit avoir lieu le 22 février 1848 à Paris provoque une réaction populaire. Le 23, des barricades sont dressées dans le centre de Paris, et la Garde nationale s’interpose entre l’armée et les insurgés. Louis-Philippe renvoie alors Guizot et appelle Thiers. Mais entre-temps l’armée a tiré et l’insurrection prend de l’ampleur. Le 24, le maréchal Bugeaud arrête le feu face au risque d’insubordination de ses troupes.

Louis-Philippe abdique alors en faveur de son petit-fils, le comte de Paris, pour éviter de « verser inutilement le sang français ». Il mourra en Angleterre en 1850. Mais le parti des révolutionnaires l’emporte : un gouvernement provisoire s’installe à l’Hôtel de Ville, avec à sa tête Ledru-Rollin, Lamartine, Louis-Blanc, Arago, et proclame la République.

Les canuts lyonnais

En novembre 1931 les ouvriers canuts de la soie se mettent en grève pour protester contre le non-respect des traditions salariales, puis investissent la ville; il faut l’intervention de l’armée du maréchal Sault pour écraser l’insurrection et supprimer l’ancien « tarif des salaires » que les ouvriers veulent maintenir.

La politique extérieure française de 1815 à 1852

Paix en Europe et conquête de l’Algérie

La période 1815-1852 est surtout caractérisée par un désir de bonne entente avec les diverses monarchies européennes.

De Waterloo (1815) à la guerre de Crimée (1854-55), soit une quarantaine d’années, les rares interventions armées de la France sont des aides ponctuelles à des régimes conservateurs en difficulté (mais aussi à des peuples cherchant l’indépendance), ou des expéditions coloniales.

Les « coups de main »

En Espagne, l’armée française prend d’assaut le fort de Trocadéro et la ville de Cadix que détiennent les auteurs d’un pronunciamiento hostile à l’absolutisme réactionnaire du roi Ferdinand VII (août 1823).

En Italie, l’armée envoyée pour contrecarrer l’avance autrichienne investit Rome le 4 juillet 1849, ce qui provoque la ruine de la République romaine de Mazzini et permet le retour du Pape Pie IX dans ses États.

Mais en octobre 1827, la flotte française, alliée à l’Angleterre, détruit à Navarin celle des Turco-Égyptiens qui cherchent à écraser le soulèvement populaire grec; de même, en août 1831, une action franco-anglaise contre les Pays-Bas assure l’indépendance de la Belgique.

Si l’opinion publique française a joué un rôle dans l’affaire grecque, en raison de la dure répression turque (massacre de Chio), ces interventions s’expliquent surtout par le souci de rendre à la France une place perdue depuis le Congrès de Vienne.

Le rapprochement franco-anglais

Les expéditions franco-anglaises contre les Turco-Égyptiens puis contre la Hollande, marquent la réconciliation entre les deux pays. Malgré une rivalité liée aux débuts de la colonisation, la France et l’Angleterre poursuivent leur rapprochement sous le second Empire (intervention commune en Crimée, traité commercial). Ainsi, après Waterloo, les deux pays ne devaient plus jamais s’opposer par les armes.

La conquête de l’Algérie

On assiste par ailleurs à une reprise de l’expansionnisme colonial : la flotte de l’amiral Duperré et l’armée du général de Bourmont prennent Alger, tenue par les Turcs (1830). Il s’agit à la fois d’une opération de prestige, destinée à restaurer le crédit de Charles X, et un moyen de mettre fin à la piraterie maritime en Méditerranée (Alger abritait un marché d’esclaves chrétiens). Puis, sous le règne de Louis-Philippe, l’occupation de l’Algérie se développe (prise d’Oran en 1831, de Bône en 1832, de Bougie en 1833, de Constantine en 1837) malgré la résistance de l’émir Abd El-Kader. A partir de 1840, le maréchal Bugeaud poursuit plus au sud et jusqu’au Maroc les troupes d’Abd El-Kader, qui se rend finalement au duc d’Aumale en décembre 1847. La colonisation, commencée en 1840, peut se développer, malgré des îlots de résistance (comme en Kabylie), et l’hostilité anglaise qui empêche la poursuite de l’expansion française vers le Maroc.

Dans le Pacifique

La France s’y implante après les expéditions de Dumont – d’Urville, Duperté et Dupetit-Thouars. Ce dernier établit un protectorat français aux îles Marquises, à Wallis et Futuna et aux Îles Gambier (1842-1844).

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Versailles. Photographie de Megan Jorgensen.
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