Mariage des Jocistes en 1939

Mariage des Jocistes le 23 juillet 1939

Le dimanche 23 juillet 1939, à l’occasion de son deuxième congrès national, la Jeunesse Ouvrière Catholique célébrait solennellement 105 mariages à Montréal, à la suite d’une année d’étude de l’encyclique « Casti Connubii » de Pie XI. En plein air, « à la face du Ciel », la J.O.C. réaffirmait sa foi dans el mariage-sacrement.

Par ce dimanche doré de juillet, les jeunes présentaient à la bénédiction nuptiale, sous le regard des évêques et en spectacle au monde, cent six jeunes couples, longuement préparés pour constituer « le noyau d’une Cité de Dieu nouvelle où chacun des foyers né de ce jour dans le Christ apportera sa pierre fondamentale. »

De cette célébration et des études qui l’ont précédée sont nés les Cours de Préparation au Mariage, lesquels se sont répandus par la suite de par le monde.

La J.O.C. est née en Belgique, vers les années 1925, de la réflexion et du zèle apostolique du chanoine Joseph Cardijn, face à la situation religieuse et sociale des jeunes ouvriers et des jeunes ouvrières de son pays. Son mouvement reçut la sanction du Pape Pie XI: « Les premiers apôtres des ouvriers sont les ouvriers eux mêmes. »

Le mouvement est présent au Canada dès les années 1930, grâce à l’initiative du Père Henri Roy, oblat, avec l’appui de Mgr Georges Gauthier, archevêque coadjuteur de Montréal. La J.O.C. se répand au niveau des paroisses de langue française du Canada et du Nord Est américain. Les Jocistes limitent son action à la jeunesse masculine et féminine du milieu ouvrier et elle poursuit des objectifs religieux et apostoliques.

Un premier congrès réunit à Montréal, en 1935, plusieurs milliers de jocistes. Le deuxième congrès, en 1939, celui des Cent Mariages jocistes, amène quelque 8 mille Jocistes. L’organisme compte alors près de 35,000 membres, rassemblés en 548 sections. Toutes les paroisses ouvrières de grandes ou petites villes ont leurs sections masculines et/ou féminines.

On venait de vivre la crise économique des années 1930 et on sentait venir la guerre. Ainsi, les jeunes ouvriers sentaient le besoin de se regrouper en un mouvement qui leur permettrait de se prendre en main et de rayonner dans leur milieu de vie.

La Session Intensive était l’instance supérieure du mouvement. Chaque été, les dirigeants et aumôniers nationaux, diocésains et régionaux de la J.O.C. se rencontraient pour fixer et élaborer le programme d’étude et d’action du mouvement. En août 1938, la Session Intensive qui se tenait à Sherbrooke a proposé de une action bien concrète pour l’été suivant, à savoir la célébration le même jour, au même endroit, de vingt cinq mariages, recrutés parmi les jocistes qui devaient se marier cette année là et qui auraient suivi les quelques quarante cercles d’études hebdomadaires portant sur le mariage, à la lumière de l’encyclique. Dans l’enthousiasme, le Père Roy promit non plus la célébration de vingt cinq mariages, mais la célébration de cinquante, puis de 100. Le Père Albert Sanschagrin reçu l’ordre du Père Roy de préparer l’aspect légal et religieux de l’événement, tandis que la préparation matérielle et fonctionnelle était la responsabilité des jocistes.

De fait, 106 couples s’étaient inscrits au mariage – un couple manqua au rendez vous, vraisemblablement pour raison de santé. Les jocistes avaient tenu à ce a dépassé quelque peu le chiffre de cent, pour être bien sûrs, d’avoir cent mariages ce jour là.

La cérémonie des Cent Mariages devait avoir lieu à la basilique Notre Dame, la plus grande église de Montréal. Mais la basilique Notre Dame n’étant pas assez grande pour accueillir tous ceux qui voudront assister à la cérémonie, les dirigeants se tournent alors vers le stade de baseball de la rue Delorimier.

Le grand jour est arrivé. Les trains spéciaux arrivent en gare, déversant dans la métropole quelque 6,000 Jocistes. Les couples formés de membres de la J.O.C. sont venus de l’ensemble du Québec, de l’Ontario et des Maritimes.

mariage des jocistes - groupe de jocistes
Mariage des jocistes. Un groupe de Jocistes vers 1939. Photo du domaine public.

De bonne heure, le matin du 23 juillet 1939, il y eut messe et communion à la cathédrale de Montréal, auxquelles participèrent les mariés et leurs témoins. Puis, c’est le déjeuner à l’hôtel Windsor, tout à côté. Le déjeuner terminé, on remit à chaque mariée une gerbe de fleur, dont elle ne se sépara pas de la journée. Cent cinq automobiles de luxe, fournies par une des grandes compagnies de fabrication d’auto, transportèrent les mariés et leurs témoins à travers les rues de Montréal jusqu’au Stade de la rue Delorimier, coin Ontario, où se déroulera la cérémonie. Chaque auto numérotée est conduite par un chauffeur en livrée!

Au Stade, un long tapis rouge s’étend de la sortie des salles jusqu’à l’autel monumentale construit au centre du terrain. Devant l’autel, les prie Dieu et les chaises destinés aux mariés, à leurs témoins, et aux prêtres devant recevoir les consentements.

La procession des mariés et des témoins se met en marche au son des orgues. Une phalange de robes blanches et d’habits endimanchés s’avance vers l’autel, aux applaudissements des 20,000 jocistes, parents et amis, logés dans les estrades. Après avoir salué l’autel, chaque couple va prendre position à la place que lui indiquait son numéro.

Les prêtres entrent ensuite deux par deux, en surplis et en étole, suivis de six évêques et de Mgr Gauthier, archevêque de Montréal. Tous saluent l’autel et vont prendre place devant les mariés qui leur étaient assignés. Suite à la cérémonie, fut la bénédiction des alliances.

Mais ici encore, la J.O.C. a innové. La coutume voulait que les hommes ne portent pas d’alliance. Aucun signe ne révélait alors qu’un homme était lié par le mariage, tandis que la femme, elle, était tenue de porter son alliance. La J.O.C. fit donc cadeau aux hommes d’une alliance; le mari, par contre, donnait l’alliance à son épouse. Et Mgr Gauthier bénit toutes les alliances, que le mari passait au doigt de son épouse, et que l’épouse passait au doigt de son époux. Puis le prêtre président remit à chaque couple un crucifix souvenir pour le jeune homme et un chapelet en nacre pour la jeune fille, objets bénits par le pape.

Le mariage a été concélébré en présence de personnalités politiques comme P.-J.-A. Cardin, ministre fédéral des Travaux publics, William Tremblay, ministre provincial du Travail, le maire Camillien Houde.

Le serment solennel a été prononcé au nom du groupe par le couple de Thérèse et Henri Séguin. Jean-Marc Bertrand, organiste de la paroisse Saint-Roch de Montréal, touchait l’orgue.

Par la suite, les mariés, leurs témoins et leurs prêtres se rendirent à l’Ile Sainte Hélène, où avait lieu le banquet de noces. Chaque couple avait une table pour 25 invités, mais avait la liberté de recevoir plus au tarif de $3.00 par tête.

Début septembre 1939, la guerre mondiale éclatait et le Canada entrait dans la lutte.

En 1940, le gouvernement canadien décrète la conscription pour tout jeune célibataire. Ce fut une course au mariage; des centaines et des milliers de jeunes se marieront en hâte pour éviter le service militaire obligatoire. On en vint, au fil des ans, à confondre ces mariages, ceux de juillet 1939, et ceux de juillet 1940. Et aujourd’hui encore on parle des Cent Mariages comme s’il s’agissait de la course aux mariages, à l’occasion de la conscription, ce qui n’est que très faux.

En effet, les Cent Mariages jocistes étaient tout autres, sous tous les aspects, que la course aux mariages à l’occasion de la conscription.

Les cent couples mariés le 23 juillet 1939 ont tenu à célébrer les anniversaires de leur mariage: le cinquième à l’oratoire; le dixième, à l’Ile Sainte-Hélène; le vingt cinquième au sanctuaire marial du Cap de la Madeleine; le trentième à la Place des Nations de Terre des Hommes; le quarantième a l’église St Jean Baptiste de Montréal, le cinquantième à Saint-Hyacinthe.

mariage des jocistes
Mariage des jocistes. Mariage Jociste le 23 juillet 1939, photo du domaine public.

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