À propos de quelques arpents de glace au Canada
Arpents de glace et de neige au Canada… Voici la lettre que Voltaire adressait à M. de Moneril en date de Monrion, le 27 mars 1757.
Elle contient la fameuse phrase relative au Canada, phrase qui a été si souvent niée et contredite. Elle a été citée par M. Eugène Réveillaud, dans son Histoire du Canada et des Canadiens Français, page 238 :
«Je suis Histrion l’hiver à Lausanne et je réussis dans les rôles de vieillard, je suis jardinier au printemps, à Mes Délices près de Genève. Je vois de mon lit le lac, le Rhône et une autre rivière. Avez-vous mon cher confrère un plus bel aspect ? Avez-vous des tulipes au mois de mars ? Avec cela on barbouille de la philosophie et de l’histoire, on se moque des sottises du genre humain, et de la charlatanerie de nos physiciens qui croient avoir mesuré la terre, et de ceux qui passent pour des hommes profonds parce qu’ils ont dit qu’on fait des anguilles avec de la pâte aigre. On plaint ce pauvre genre humain qui s’égorge dans notre continent A propos de quelques arpents de glace en Canada. On est libre comme l’air depuis le matin jusqu’au soir. Mes vergers, mes vignes et moi nous ne devons rien à personne »… Et voilà ce qu’écrivait Voltaire, le 27 mars 1757.
(FAUCHER DE SAINT-MAURICE. Bulletin des recherches Historiques, 1896.)
Plus tard, dans son roman « Candide », l’année même où les troupes françaises commandées par Montcalm s’ensevelissaient sous les ruines de la colonie (1759), Voltaire écrivait :
Vous savez que ces deux nations (la France et l’Angleterre) sont en guerre pour quelques arpents de neige vers le Canada, et qu’elles dépensent pour cette belle guerre beaucoup plus que tout le Canada ne vaut ».
ENFIN LE ROI DORMIRA TRANQUILLE
Madame de Pompadour dédaignait le Canada tout, autant que Voltaire. On lui prête ce mot terriblement frivole à la nouvelle de la prise de Québec par les Anglais : » Enfin, le roi dormira tranquille » !
(Mémoires et comptes rendus de la Société Royale).
QUAND LE FEU EST À LA MAISON…
Une grande mission avait été confiée à Bougainville et à Douil au nom du Canada mourant : ils devaient raconter à la France, qui ne voulait pas les savoir, les douleurs de ce noble pays, implorer pour lui des secours en hommes et en vivres, en munitions, si la paix était possible.
Bougainville soumit au gouvernement des cartes détaillées du théâtre de la guerre et plusieurs projets appropriés à toutes les hypothèses…
Le gouvernement délibéra longuement sur la réponse aux cris de détresse de la colonie ; on récapitula les ressources disponibles du royaume : recensement fait des arsenaux, des ports, des magasins et des casernes, la mère-patrie pouvait disposer en faveur de la Nouvelle-France de 326 recrues et du tiers des vivres implorés !
« Monsieur, quand le feu est à la maison, on ne s’occupe pas des écuries », dit cyniquement à Bougainville un ministre de la marine, nommé Berryer. « On ne dira pas du moins que vous parlez en cheval », répliqua le futur amiral.
Berryer venait de dire le dernier mot, la métropole sacrifiait sa fidèle colonie, la mère abandonnait l’enfant.
(Montcalm et le Canada Français. CHARLES DE BONNECHOSE).
Note : Nicolas-René Berryer, magistrat et homme d’état français, né en 1703, mort en 1762. Créature de Mme de Pompadour, se fit remarquer par son servilisme. (Source : Nouveau Larousse.)
LAFAYETTE ET LES CANADIENS
Quelques seigneurs canadiens qui avaient combattu les armées américaines, ayant rencontré dans les colonies le général Lafayette : « Eh quoi leur dit ce démagogue, vous vous êtes battus pour demeurer colons au lieu de devenir indépendants ! restez donc esclaves » !
(Les Institutions de l’Histoire du Canada, 1855. MAXIMILIEN BIBAUD).
Voir aussi :