Histoires du passé du Québec

Le dernier coup de canon et autres histoires du passé

(Tiré des Récits d’histoire canadienne, par E.Z, Massicotte. Librairie Beauchemin, 1913. Bibliothèque canadienne, collection Dollard).

La deuxième, cession du deuxième, parlement sous l’Union fut ouverte à Montréal par Lord Catheart, le 20 mars 1846. C’est à cette cession que le gouvernement proposa une loi de milice qui passa sans opposition, les deux côtés de la chambre étant unanimes à vouloir mettre la milice sur un pied efficace. Sir Étienne-Paschal Taché fit à cette, occasion un discours rempli de patriotisme. Après avoir rappelé les exploits de ses compatriotes en 1812, il assura la Chambre qu’ils étaient prêts à tenir une. conduite aussi
héroïque lorsque l’occasion s’en présenterait.

« Ce que nos pères ont fait, disait-il, ce que nous avons fait nous-mêmes pour la défense do cette colonie, nos enfants seraient encore prêts à le faire, si l’on voulait rendre justice au pays.

Notre loyauté à nous n’est pas une loyauté de spéculation, de louis, schellings et deniers, nous ne l’avons pas constamment sur les lèvres, nous n’eu faisons pas un trafic. Nous sommes dans nos habitudes, par nos lois, par notre religion, comme l’a très bien remarqué mon honorable ami pour la cité de Québec, monarchistes et conservateurs. Tout ce que nous demandons, c’est que justice nous soit faite ; et si un ennemi se présente, vous verrez nos légers et joyeux bataillons voler à sa rencontre comme à un jour de fête et présenter hardiment leurs poitrines au fer de l’assaillant. Mais, diront nos détracteurs, vous êtes des mécontents ; un membre qui n’est pas à sa place nous disait, il y a quelques jours, vous êtes intraitables ; vous êtes des rebelles, nous disent les ultra ; nous possédons seuls la loyauté par excellence ! Mille et mille pardons, messieurs, traitez-nous comme les enfants d’une même mère, et non comme des bâtards ; un peu plus de justice égale, non dans les mots, mais dans les actes ; je réponds que si jamais ce pays cesse un jour d’être britannique, le dernier coup de canon tiré pour le maintien de la puissance anglaise en Amérique le sera par un bras canadien.

(Bulletin des Recherches Historiques, 1896. P.-G. Roy).

Note: Sir Éticnne-Pascal Taché, 116 CM 1795, mort en 1805, fut premier ministre avec Sir A.McNab en 1855 puis avec Sir .John A. Macdonald en 185G et en 1801.

Nos cœurs à la France, nos bras à l’Angleterre

Lorsque, en 1851, la frégate française La Capricieuse remonta le Saint-Laurent, le commandant de Belvèse ne manqua pas de rendre visite à mademoiselle Marguerite de Lanaudière, fille du chevalier Charles de Lanaudière, alors âgée de quatre-vingts ans.
C’est au cours de cette visite que mademoiselle de Lanaudière dit au marin français : « Nos cœurs sont à la France, mais nos bras sont à l’Angleterre ».

(Bulletin des Recherches Historiques, 1896. P.-G. Roy).

La race inférieure

Cette expression de « Race inférieure », appliquée aux Canadiens-Français, n’a jamais été prononcée, mais elle s’infère d’une phrase malheureuse dite par Sir Edmund Walker Head, au cours d’un banquet qui eut lieu à Hamilton, Ontario, le 12 octobre 1855. Voici cette phrase, telle qu’elle est reproduite dans le Bulletin des Recherches Historiques, vol. XI :

« De même que nous regardons vers l’est pour voir le soleil se lever et poursuivre sa course journalière, de même,en Canada, nous regardons du côté de l’ouest pour observer les plus grands progrès en richesse et en population… Il est comme vous le savez, diverses circonstances auxquelles on peut attribuer cette prééminence de votre contrée de l’ouest. Elle est due à la supériorité de la race dont la plupart de vous descendez ; duc à la fertilité du sol, à la douceur et à la salubrité du climat; due aux avantages de votre position et de vos communications intérieures ».

Ce discours « souleva alors une tempête dans le Bas-Canada » et le gouverneur Head désavoua les paroles qu’on lui prêtait, mais « son explication fut jugée boiteuse ».

Ironie des choses ! Quarante ans plus tard (1899), un Français, Edmond Dcmolins, publiait en France, un ouvrage retentissant, dont la vogue dure encore, et qui portait pour litre : « À quoi tient la Supériorité des Anglo-Saxons ».

(Revue Populaire., 1911. LE CHERCHEUR).

Sir Edmund Walker Head, né en 1805, fut gouverneur du Canada de 1854 à 1861. Littérateur distingué. C’est lui qui mit fin au cabinet Brown-Dorion après 48 heures d’existence.

« Double Shuffle»

En 1858, après avoir vécu 48 heures le ministère Brown-Dorion ayant été défait, le gouverneur chargea MM. G.-E. Cartier et J.-A. McDonald de former un nouveau ministère.

« Une question constitutionnelle s’éleva au sujet de la réélection des ministres. Ceux-ci reprirent les mêmes portefeuilles sans se présenter devant leurs constituants ; ils s’appuyaient sur une clause, de l’acte de l’indépendance des membres, qui exemptait de la réélection un ministre abandonnant un portefeuille pour en accepter un autre, avant l’expiration d’un mois. Afin d’éviter cette élection, plusieurs ministres acceptèrent un portefeuille différent de celui qu’ils avaient occupé au moment de la retraite du ministère McDonald-Cartier et le lendemain, ils reprirent leurs anciens portefeuilles ». (Turcotte, Le Canada sous l’Union.)

« Ce procédé connu sous le nom de double sluffle par lequel les chefs conservateurs réussirent à reprendre le pouvoir et leurs portefeuilles sans se faire réélire, fait plus honneur à leur esprit qu’à leur conscience ». (L. 0. David, l’Union des Deux Canadas).

Cette affaire de « double shufïïe » défraya pendant des mois la polémique des journaux et les philippiques des tribunes. Il est certain que les ministres conservateurs avaient fait servir la loi pour un cas qui n’avait pas été prévu par les législateurs. Mais est-ce un grand crime ?

Bien peu de gens le soutiendraient aujourd’hui.

(Ignotus, Bulletin des Recherches Historiques, 1905.)

Ajoutons que cette expression assez difficile à rendre en français, signifie à peu près : « double mouvement ».

Aime Dieu et va ton chemin

On s’est souvent demandé quelle était l’origine de la belle devise des zouaves pontificaux canadiens : « Aime Dieu et va ton chemin ».

M. l’abbé Denis Gérin, ancien zouave et aujourd’hui curé de Saint-Justin, explique clairement cette origine dans l’histoire du séminaire de Nicolet publiée, il y a quelques années, par M. l’abbé J.-A.-T. Douville. Voici le précieux document que nous fournit notre ancien compagnon d’armes :

« Dans l’automne 1867 avait lieu l’invasion du territoire pontifical par les nouveaux barbares du Nord. Après les brillants faits d’armes de Bagnorca, de Monte-Libretti, de Nercola, quelques cents soldats pontificaux se réunissaient à Mentana où ils attaquaient et mettaient en déroute les hordes garibaldiennes. Deux soldats canadiens, Murray et Larocque, avaient pris part à cette victoire en se couvrant de glorieuses blessures. Watts Russel agonisant, des dernières gouttes de son sang, venait d’écrire sur une pierre les mots devenus chers à tous les Canadiens : ama Dio e tira via, aime Dieu et va ton chemin. Ces événements, télégraphiés à l’univers catholique, créèrent un saint enthousiasme partout, mais nulle part plus qu’en Canada. Le vieux sang gaulois se réveilla. La soif du dévouement descendit au cœur d’une foule de jeunes gens et bientôt l’on commença à ébaucher le plan d’une croisade canadienne ».

(Bulletin des Recherches Historiques, 1906. C.-E. Rouleau).

Nous sommes des Anglais parlant français

C’est au cours d’un banquet offert à Sir Georges-Cartier et à l’honorable Langevin, par les négociants de Québec, le 23 décembre 1869, que Sir Georges Cartier prononça ce mot devenu historique. Voici l’extrait qui le contient : « Heureusement, nous avons en nous cet esprit nouveau qui a t’ait du Bas-Canada une province prospère de l’Empire Britannique. Nous ne sommes plus des Français ici, mais bien des citoyens anglais, parlant le français ».

(Discours de Sir Georges Cartier. Joseph Tassé.)

Rue de Montréal.
Une rue de Montréal en 2020. Photo de GrandQuebec.com.

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