Les Fortifications de Montréal au XVIIIe siècle
Les travaux des fortifications, commencés en 1717, se continuèrent avec lenteur, à cause de la persistante opposition des habitants, surtout des institutions de mainmorte. Le 4 mai 1730, une grande assemblée publique donna aux protestations individuelles et particulières un caractère général et presque officiel. En effet, assistaient à la réunion M. de La Corne Saint-Luc, lieutenant de roi, et commandant de la ville, M. de Silly, commissaire de la Marine et subdélégué de l’Intendant, Pierre Raimbault, lieutenant général, Charles de Couagne, chargé de la perception de la taxe spéciale des fortifications.
Les quatre officiers supérieurs du gouvernement de Montréal discutèrent avec les délégués du peuple et des institutions sur les griefs de tous les intéressés. D’un commun accord, on dressa procès-verbal des « remontrances, » respectueuses mais énergiques, qu’il convenait de faire à sa Majesté. On demandait au moins une exemption partielle de la taxe imposée. L’important document, qui fut présenté au roi, portait les signatures de M. de Bridemont, représentant les officiers militaires, de M. Normant, au nom des Seigneurs de l’Île, du père d’Heu, supérieur des Jésuites, de M. de Francheville, pour les Religieuses de l’Hôtel-Dieu, du frère Gervais, de l’Hôpital Général, de M. Rochbert, pour les Sœurs de la Congrégation, de MM. Neveu, Radisson et Malhiot au nom des négociants, de Charles Gervais et Louis Cavelier de la part des habitants, artisans et colons. (« Copie des remontrances à sa Majesté par les députés de la ville de Montréal » — Archives de la Marine: « Collection Moreau St-Mery », vol. 9, F.2, folio 257-261).
L’unanimité des classes aussi fortement représentées amena les autorités à « apporter quelques adoucissements » à la taxe imposée aux habitants et aux communautés. Le Gouverneur et l’Intendant rendirent une ordonnance, dont nous ne connaissons pas l’exacte teneur, mais qui donnait sans doute satisfaction aux protestataires, puisque de ce moment l’opposition cessa.
Les travaux se continuèrent sans provoquer d’autre critique sérieuse. Un arrêt du Conseil d’État, rendu le 1er mai 1743, établissait le coût total de l’entreprise à la somme de 445 000 livres, dont un peu plus du quart avait été payé par le public. Le roi fit remise de la moitié de ce qui restait dû, soit 165 000 livres. En 1760 cette dette n’était pas encore éteinte.
Ces grands ouvrages de défense ne furent pratiquement d’aucune utilité. En 1760 ils étaient déjà en très mauvais état. Les Anglais n’eurent pas même l’occasion de dresser leurs batteries pour en faire le siège, car M. de Vaudreuil, qui avait déjà perdu Québec, s’empressa de capituler à la première sommation du général anglais, sir Jeffrey Amherst.
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