Fondation de Montréal
En 1642, on travailla tout l’été et tout l’hiver à la construction du fort, sans avoir à subir, Dieu merci!, d’attaques des Iroquois. La flotte de France avait amené pour le Montréal une douzaine d’ouvriers engagés par les messieurs de la Compagnie, dont un charpentier fort habile, nommé Gilbert Barbier, et quarante mille livres de denrées alimentaires et d’outillages.
M. de Repentigny, qui commandait la flotte, était aussi porteur d’heureuses nouvelles qu’il tint lui-même à venir communiquer aux Montréalistes. « Il leur apprit que messieurs les Associés, seigneurs de cette île, s’étaient tous offerts à Dieu par les mains de la Sainte Vierge, le jour de Présentation, dans l’église de Notre-Dame de Paris, et présentant leurs vœux et desseins pour le Montréal. »
Ces associés étaient maintenant au nombre de quarante-cinq, parmi lesquels, outre les fondateurs, M. Olier, La Dauversière et Fancamp, le duc de Liancourt, l’abbé Dareau, l’académicien Hubert de Montmort, M. de la Marguerie, le marquis de Renty, les deux frères Le Prêtre, M. de Bretonvilliers, Sulpicien, l’abbé de Caylus, sans oublier quelques dames, la Chancelière, Mme de Villesavin, Mme Seguin, Mme de Bullion…
En 1642, profitant de l’arrivée d’un nouveau contingent d’hommes spécialement envoyés par le roi et le cardinal de Richelieu pour la défense du pays, Montmagne se mit en quête d’un nouvel endroit à fortifier. Les Relations des Jésuites pour l’an 1642 disent : « Pendant que les charpentiers travaillent à Québec, il monte quarante lieues plus haut; il s’en va visiter la rivière des Iroquois, remarquer une place fort propre pour bâtir une forteresse qui commande l’embouchure de ce fleuve, par où il se gorge dans la grande rivière de Saint-Laurent; il fait monter des barques qui portent les choses nécessaires pour ce dessein… Le 13e jour d’août, M. le gouverneur arriva à la rivière des Iroquois pour commencer ce fort qu’il avait désigné. On fait jouer les haches dans cette grande forêt; on renverse des arbres, on les met en pièces, on arrache les souches, on désigne la place, on y dit la première messe. Après la bénédiction faite, les canons retentissent, une salve de mousquets honore ces premiers commencements sous les auspices de notre grand roi et sous la faveur de son Eminence. »
Ce fort allait gêner considérablement les Iroquois dans leurs incursions belliqueuses sur le Saint-Laurent. Ainsi l’alarme retentit-elle à travers les Cinq-Cantons (Cinq nations iroquoises).
« Sept jours après le premier coup donné, comme tout le monde s’occupait à dresser une palissade pour se mettre à couvert de l’ennemi, une troupe de trois cents Iroquois, se glissant à pas de larrons dans ces forêts, donna bien de l’exercice. Et si M. le gouverneur n’eût été présent, tous les ouvriers étaient taillés en pièces. M. le gouverneur sur, étant sur l’eau dedans son brigantin, se fait porter au plus tôt à terre sur un bateau; il entre dans le réduit qui n’était pas encore en état de se bien défendre.»
Armés maintenant de mousquets et d’arquebuses fournis par les Hollandais, les Iroquois ne s’enfuyaient plus au premier coup de feu comme ceux que Samuel de Champlain avait vaincus trente-trois ans auparavant; ils étaient devenus un ennemi redoutable avec lequel devaient compter des soldats européens. La lutte fut chaude autour des retranchements inachevés du Fort Richelieu (c’est aujourd’hui la ville de Sorel, et la rivière des Iroquois est devenu le Richelieu. Ce fut d’ailleurs Montmagny qui lui donna ce nom. Un village fondé en 1860, en face de Chambly, porte maintenant le nom de Richelieu), mais enfin les barbares lâchèrent pied. « Ils firent néanmoins leur retraite avec conduite, se retranchant dans un fort qu’ils avaient secrètement dressé à une lieue ou environ au-dessus de nous. » Ils laissaient sur le terrain de nombreux morts et blessés. Du côté français, « un caporal nommé Deslauriers fut tué, et le sieur Martial, secrétaire de M. le gouverneur, reçut un coup d’arquebuse dans l’épaule; trois autres Français furent blessés, dont l’un a un coup qui lui passa d’une joue à l’autre.
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