Révolution tranquille au Québec – phase deux
En 1960, le gouvernement Lesage, l’équipe du tonnerre, inaugure une nouvelle façon de gouverner qui est sans précédent dans l’histoire du Québec. Ce gouvernement se distingue par un mouvement de réformes, appelé la Révolution tranquille.
En septembre 1962, Jean Lesage convoque prématurément des élections générales sur le thème principal de la nationalisation de l’électricité. Le premier ministre et chef du parti libéral réussit ce tour de force et remporte un scrutin aux enjeux vitaux. Il faut rendre au peuple du Québec ce qui appartient au peuple du Québec. Son plus riche patrimoine, celui de l’électricité. Et ça presse, demain il sera trop tard. C’est maintenant ou jamais que nous serons maître chez nous.
À l’élection du 14 novembre 1962, le parti libéral consolide sa position. Jean Lesage est réélu à une majorité éloquente par le comté de Québec-Ouest. Les libéraux remportent une victoire avec 63 candidats élus contre 31 unionistes et 1 indépendant. 56% des électeurs ont voté pour le Parti libéral et 42% pour l’Union nationale.
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C’est la deuxième phase de la Révolution tranquille tant au plan politique qu’au plan économique. Avec le slogan « Il faut que ça change », l’équipe Lesage transforme les institutions et les mentalités. Il multiplie les interventions de l’État dans les domaines jusque-là réservés au secteur privé. La nationalisation des compagnies hydroélectriques du Québec en est un puissant détonateur.
Menée par René Lévesque, la nationalisation de l’électricité a lieu en 1963. La Société générale de financement (SGF) est créée en 1962.
En 1963, un nouveau Code du Travail est adopté. La nationalisation d’autres richesses naturelles a lieu, avec la création des sociétés d’État: En 1964, Sidérurgie du Québec (SIDBEC) voit le jour et en 1965, c’est le tour de la Société québécoise d’exploration minière (SOQUEM). Une vaste réforme de l’enseignement public se développe, dont l’apogée est la création du ministère de l’Éducation en 1964. En juillet 1964, le gouvernement reconnaît le droit de grève aux employés du secteur public.
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On créé d’autres importantes institutions économiques et sociales, telles la Caisse de dépôt et placement du Québec et la Régie des rentes (toutes deux en 1965). En 1965, les fonctionnaires obtiennent le droit de se syndiquer. En 1966, 75% d’entre eux sont membres d’un syndicat affilié à la C.S.N.
Au niveau fédéral, après les élections du 14 novembre 1962, les relations avec Ottawa deviennent plus revendicatives. L’autonomie du Québec se transforme petit à petit en un véritable nationalisme québécois. Des mouvements radicaux naissent et commencent à promouvoir l’indépendance du Québec. Le 10 octobre 1964, le Samedi de la matraque, une violente émeute éclate à l’occasion de la visite de la reine Élisabeth II à l’Assemblée nationale du Québec pour le 100e anniversaire des conférences de Charlottetown et de Québec. (Les policiers de la Police Provinciale ont sévèrement réprimandé l’émeute à l’aide de leurs matraques, alors la journée reste dans l’histoire comme le Samedi de la matraque).
* Révolution tranquille au Québec
Encore en 1960, André D’Allemagne et Marcel Chaput fondent le Rassemblement pour l’indépendance nationale (RIN.), un mouvement dont le but est de promouvoir l’indépendance du Québec (Pierre Bourgault deviendra son nouveau chef en mai 1964).Le 11 décembre 1962, une manifestation d’étudiants de l’Université de Montréal tourne à la violence après que Donald Gordon, président du Canadien National, ait déclaré que les Canadiens-français n’ont pas les compétences requises pour siéger au conseil d’administration de cette compagnie ferroviaire. En mars 1963, les premiers attentats du FLQ secouent la province.
Jean Lesage ne va jusque là, mais il réussit à négocier avec le fédéral un droit de retrait avec compensation. Les négociations pour amender la Constitution canadienne sont cependant dans l’impasse lorsque en janvier 1966, Lesage refuse d’adhérer à la formule Fulton-Favreau, proposé en octobre 1965.
La création de nouveaux organismes engendre le développement sans précédent d’une fonction publique dorénavant syndiquée avant le droit de grève; cela permet d’absorber l’arrivée sur le marché du travail de milliers de jeunes diplômés. Les fonctionnaires issus des classes moyennes de l’après-guerre et de la petite bourgeoisie francophone revendiquent un plus grand contrôle de l’économie québécoise, et une voix au chapitre tant au plan fédéral qu’international.
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Toutes les réformes indisposent cependant plusieurs personnes influentes. D’ailleurs, les réformes coûtent cher, les déficits atteignent des niveaux assez élevés et les taxes augmentent en conséquence. La nationalisation de l’électricité a coûté 604 millions de $.
En avril 1966, dans une atmosphère de grève générale dans la fonction publique, Jean Lesage déclenche les élections pour le 5 juin 1966. Le scrutin a finalement raison du gouvernement de la Révolution tranquille.
En fait, le Parti libéral a obtenu le plus grand nombre de voix – 47,6% ont voté pour le Parti libéral, 40,9 pour l’Union nationale, 8% pour le RIN et 3,2% pour le Rassemblement national (un autre parti indépendantiste), mais les comtés ruraux, moins favorables aux libéraux, continuaient à jouir d’un poids disproportionné par rapport aux comtés urbains et ce malgré une réforme de la carte électorale adoptée en 1965 (le nombre de circonscriptions a été augmenté de 95 à 108.Cet ajout s’est fait surtout sur l’Île de Montréal et la révision a permis de rééquilibrer les circonscriptions par rapport à la population).
* Révolution tranquille au Québec
La situation a permis à l’Union nationale d’emporter la majorité des sièges à l’Assemblée nationale. L`Union nationale remporte donc les élections avec 56 candidats élus contre 50 libéraux et 2 indépendants. Jean Lesage devient député de la circonscription de Louis-Hébert et chef de l’opposition.
La Révolution tranquille est complétée. Le Québec change à toujours.