L’échange marchand

L’échange marchand – une activité marginale

Vers le Xe siècle, l’échange marchand : Durant cette période dominée par les guerres et le pillage, l’économie est largement autarcique. Mais il subsiste toutefois des spécialistes du commerce lointain

Tout échange marchand hors du domaine n’a cependant pas disparu durant le temps de replis domanial : les seigneurs, comme les communautés religieuses, écoulent leur éventuel surplus à la foire, au village ou à la ville.

Les premiers, surtout, ont besoin de se procurer des espèces métalliques qui assurent la fidélité et permettent d’acquérir les biens de luxe (non produits par eux-mêmes) ou les esclaves importés des régions lointaines. Mais l’échange marchand ne porte pas uniquement sur les biens de luxe, car tout le monde ne peut vivre en autarcie : à côté des denrées alimentaires comme le sel, l’huile, le vin, le poisson… on peut citer le fer, le bois et autres matériaux de construction, les tissues, fourrures et vêtements, les armes, et divers produits, tels que vases, verres, objets de cuir, les objets religieux ou funéraires.

Les marchands

C’est ici qu’interviennent les « intermédiaires spécialisés que sont les marchands, dont on n’utilise les services que de façon exceptionnelle, quand il s’agit de transporter loin les produits à vendre ou de chercher à l’étranger des produits rares.

Ces marchands (« mercatore » ou « négociantes ») constituent une catégorie sociale encore marginale et composée en grande partie d’aventuriers prêts à prendre le risque de déplacements difficiles et dangereux. On peut toutefois distinguer trois types de marchands : ceux qui approvisionnent les villes et qui y vivent; ceux qui sont spécialisés dans le commerce lointain; ceux qui sont directement employés par les seigneurs.

Cette fonction marchande est souvent exercée par des peuples spécialisés dans la vente de certains produits ou le commerce entre certaines régions : ainsi des marchands francs vendent des armes aux Slaves et aux Avars, les marins frisons qui tiennent la mer du Nord vendent en Allemagne du blé, du vin, des tissus ou des esclaves, les Grecs et les Syriens apportent les épices et de la soie. Mais on trouve également des marchands allemands en Méditerranée et des marchands juifs importateurs de produits « orientaux », bien introduits auprès des grands (de Charlemagne en particulier).

D’une façon générale, les marchands du roi jouissent de privilèges personnels (exemption de taxes, de service armé, immunité de leurs matériels de transport, droit de revendiquer la justice royale…).

Les routes

Si les anciennes voies romaines sont souvent entretenues et permettent le déplacement, les voyages restent toujours dangereux et lents (on fait environ 30 kilomètres par jour).

L’essentiel des grands échanges se fait donc par voie d’eau, dont les axes principaux se situent en dehors du monde franc, ou n’atteint que ses frontières. En Méditerranée, tant que la flotte byzantine assure une sécurité relative, la Grèce, l’Égypte, l’Italie, l’Espagne, Narbonne, Marseille et Arles restent en contact étroit : on échange des épices (poivre, cumin, cannelle, clous de girofle), des fruits (dattes, figues, amandes, pistaches), du papyrus, de la soie, des pierres précieuses, des parfums, de la vaisselle, de la verrerie fine, des objets d’ivoire, des reliques… contre les esclaves, des tissues, des fourrures, des armes, des métaux (argent, étain), du bois…

Mais l’expansion arabe du VIIIe siècle puis la défaite byzantine en Crète, en 829, donneront le contrôle de la Méditerranée à la flotte musulmane.

Sur l’Atlantique, Nantes et Bordeaux sot en contact avec le Sud de l’Angleterre et l’Irlande et les marins bretons restent actifs. L’Angleterre vend de l’étain, du cuivre, du plomb, achète du vin, du blé, du sel. La mer du Nord est aussi le siège d’échanges importants, à partir de Rouen, Quantovic et Amiens, vers l’Angleterre, le Danemark et la Baltique (Londres, Tiel, Mestricht, Utrecht…) : vins, blé sel, verreries, poteries, armes, fourrures, tissus, esclaves.

Enfin, des contacts marchands existent aussi avec l’Est, vers Mayence, Ratisbonne, Cracovie et Prague, qui joue le rôle d’un grand marché d’esclaves. Ce sont précisément des esclaves, ou des chevaux, que les Francs viennent chercher, contre des armes ou des métaux.

Mais en définitive, s’il subsiste donc des courants d’échanges proches ou lointains, et des professionnels du commerce, ils ne jouent qu’un rôle secondaire dans la société occidentale d’alors, essentiellement rurale et guerrière.

Les marchands juifs

Les colonies juives sont importantes dans les villes commerçantes comme Lyon, Châlon ou Arles. Les marchands bénéficient d’exemptions fiscales et de la protection des grands, qui apprécient leurs services, leur compétence et leur réseau de correspondants établis partout dans le monde méditerranéen. Cela leur permet également de fournir des esclaves à l’Europe chrétienne où l’Église interdit de réduire un chrétien en esclavage, mais tolère l’esclavage des non-chrétiens.

Les lieux d’échange

Les échanges se font le plus souvent à l’occasion de marchés hebdomadaires, ou de foires annuelles, mais il existe aussi quelques boutiques permanentes dans les villes, et des entrepôts.

Le marché relève de la décision du pouvoir royal (ou seigneurial), et donne lieu à perception de droits fiscaux. Le développement des diplômes de concession, au Xe siècle, sera l’indice de la création de nouveaux marchés et de l’intensification des échanges.

Voir aussi :

Tiers de sou en or, à l'effigie de Dagobert 1er, roi d'Austrasie (622-638 or 639) et roi des Francs (628-638 or 639). Bien que les Ve-Xe siècles soient surtout ceux d'une économie d'autosubsistance et de troc, l'usage de la monnaie n'a pas disparu, mais sa frappe dépend de la puissance des princes (Bibliothèque nationale, Paris).
Tiers de sou en or, à l’effigie de Dagobert 1er, roi d’Austrasie (622-638 or 639) et roi des Francs (628-638 or 639). Bien que les Ve-Xe siècles soient surtout ceux d’une économie d’autosubsistance et de troc, l’usage de la monnaie n’a pas disparu, mais sa frappe dépend de la puissance des princes (Bibliothèque nationale, Paris).

Laisser un commentaire