Drame domestique

Drame domestique : Félix Tellier, 35 ans, frappe de sept coups de couteau sa femme et, dans la prison, tente de se suicider. – L’état de la malheureuse victime est précaire.

(Câblogramme spécial)

Victoriaville, Québec, 14 mai 1907. – Un drame horrible vient de causer un grand émoi dans la paisible paroisse de Stanfold. Un nommé Félix Tellier, âgé de 35 ans, sédentaire, habitant dans le village de Stanfold, a frappé sa femme. Née Marie Sévigny et âgée de 45 ans, de sept coups de couteau.

Les époux étaient mariés depuis onze ans et n’avaient pas d’enfants. Ils étaient arrivés à Stanfold depuis quelques semaines seulement, ayant passé à Slaterville, R.I., les mois d’hiver. Depuis le retour, Tellier accusait sa femme d’infidélité et la malmenait, il en venait même parfois, aux coups, et c’est en vais que M. le curé Édouard Baril, de Stanfold, tentait de mettre la paix entre eux.

Hier matin, Tellier racontait à M. Georges Émond, fils, cultivateur, qu’une querelle domestique venait d’avoir lieu, lorsque Mme Tellier sortit précipitamment de chez elle, et sauta dans la voiture où s trouvaient M. Émond et Antonio Bouthot. Tellier saisit sa femme à bras le corps et la jeta rudement sur le sol. Celle-ci courut se réfugier chez M. Émond où son mari la rejoignit bientôt; il voulut la ramener à la maison, mais elle ne voulait rien entendre. M. Émond leur conseilla de soumettre leur différend au curé, et d’accepter sa décision. Le curé étant absent, c’est M. l’abbé Guillet, le vicaire qui se présenta; il fut convenu qu’on attendrait l’arrivée de Mé le curé et que, entre temps, Mme Tellier, se réfugierait à l’hôtel Talbot. Son mari la relança à ce dernier endroit, renouvelant ses instances pour la ramener, mais elle refusa toujours et allé se réfugier au presbytère.

Peu après-midi, Tellier rejoignait sa femme dans la cuisine du presbytère où se trouvaient aussi la ménagère, Mme veuve Zénaïde Auger et une dame Gadbois. Il commença alors à insister auprès de sa femme pour qu’elle réintègre le domicile conjugal ; mais comme cette dernière persistait dans son refus, il fut pris soudain d’une affreuse colère, et, tirant de sa poche un couteau d’une longueur de 7 pouces, il se mit à poursuivre, autour de la pièce, sa femme. La malheureuse, après quelques instants de cette course, tomba, affolée, à bout de forces, sur le plancher, et le lâche agresseur, la saisissant par le cou, l’abattit violemment sur le plancher, et lui posant ses genoux sur le corps, se mit à lui lacérer la poitrine et le ventre, à coups de couteau.

Mme Auger et Mme Gadbois, impuissantes à empêcher ce meurtre horrible, se lancèrent au-dehors pour appeler du secours. Tellier abandonna alors sa victime, qui gisait dans une mare de sang, et tenta de se sauver, mais le jeune J.-A. Baril et Walter Bernard, qui étaient accourus, l’empoignèrent et l’attinrent sur place.

Mme Tellier parvint à se relever et se glissa sur le perron du presbytère, mais on la fit rentrer, et le Dr. Brassard fut mandé d’urgence : il constata que la malheureuse souffrait de sept blessures horribles, son était était précaire.

Tellier a essayé de se jeter sous les roues de la locomotive en arrivant à la gare, et, à la prison de Stanfold, il a tenté, à plusieurs reprises, de s’étrangler. Il est d’un mutisme complet au sujet du drame. C’est un personnage antipathique à toute la population de Stanfold, où il est allé plus d’une fois en prison, pour vol. Le docteur Brassard est d’avis que Tellier souffre d’un dérangement cérébral.

(Une nouvelle, parue dans le Journal Le Canada, 16 mai 1907).

Voir aussi :

Parc calme
« Le méchant n’est pas seulement celui qui a commis une injustice, mais encore celui qui a en dessein de la commettre. On peut être coupable sans avoir fait aucune mauvaise action. Les crimes sont accomplis, quant à leur malice, même avant que l’action soit consommée. » Citation de Ambroise Rendu, pédagogue français, né en 1778 et mort en 1860 ; Traité de morale (1834). Photo : Histoire-du-Quebec.ca.

Laisser un commentaire