Dans la vallée d’Ohio

Montréalais dans la vallée de l’Ohio

Colons pour peupler la Louisiane : La paix revenue, M. de La Galissonière, gouverneur, proposa à la cour d’envoyer 10 000 colons pour peupler le Canada et la Louisiane. Pour consolider les deux colonies et prévenir les Anglais dans leur dessein d’occuper la vallée de l’Ohio, qui les réunissait, le gouverneur voulut établir les droits de la France sur le pays.

Il envoya Pierre Céloron de Blainville, gentilhomme canadien de Montréal, prendre possession officielle de la vallée de Belle-Rivière (Ohio).

L’expédition montréalaise partit de Lachine le 15 juin 1749. Parmi les officiers étaient MM. de Contrecœur, de Villiers, de Niverville, de Céloron, fils et les deux frères Joncaire. Le détachement se composait de 8 officiers, 5 cadets, 20 soldats réguliers, 180 Canadiens et une trentaine de sauvages. De Blainville arriva à Belle-Rivière le 29 juillet, remonta les principaux tributaires du fleuve et déposa à plusieurs endroits des plaques de plomb aux armes de Louis XV. Il revint par le Détroit et atteignit Montréal le 10 novembre. (« Journal de la campagne entreprise par M. de Céloron envoyé à Belle-Rivière,» nov. 1749. — Archives de la Marine: «Collection Moreau St. Mery,» vol. II. F, folio 318.)

L’explorateur constata malheureusement que les nations sauvages étaient plutôt mal disposées à l’égard des Français et que leur intérêt les rapprochait des Anglais par leur commerce. Les Anglais, profitant des sympathiques dispositions des Indiens pour leurs traficants, contestèrent par les armes les droits que prétendait avoir la France sur ces territoires. On connaît l’affaire Washington-Jumonville.

M. de Contrecœur, commandant au fort Duquesne, avait envoyé M. de Jumonville à la découverte à la tête d’un parti d’éclaireurs. Arrivé aux Grandes Prairies, l’envoyé français rencontra George Washington à la tête de 150 hommes. Après deux décharges, commandées par l’officier anglais, de Jumonville, par son interprète, réussit à faire entendre à Washington qu’il avait un mandat à lui communiquer. Le feu cessa; c’est pendant que l’interprète lisait ou s’apprêtait à traduire la sommation que M. de Jumonville reçut à la tête une balle qui le renversa mort.» (Père Louis Lejeune: «Dictionnaire Historique du Canada,» vol. I, p. 849).

Neuf Canadiens tombèrent à ses côtés, les autres auraient été envoyés prisonniers de guerre en Angleterre et à la Martinique. (« Les prisonniers* envoyés à Londres en trophée, s’appelaient: Drouillon, officier; de Boucherville, cadet; du Sablé, cadet; Louis Paul, de Sorel; J.-Bte Berger, de Varennes; Augustin Bonvouloir, de Longueuil; Joachim Parent, de Soûlantes; Nicolas Milles, de Lachine; Ducharme, de même; Joseph Brown, de Montreal; Albert Ouimet, des Mille-Isles; Joseph Duchâtelet, de L’Assomp tion; Joseph Larabel, de la Longue-Pointe; — Prisonniers envoyés à la Marti nique; Cirardin, de l’Ile-Jésus; Lavigne, de Varennes; Morisseau, de Repentigny; Trouin, de même; Collet, de Charlesbourg; Homier, de Montréal.» — Père Louis Lejeune: « Dictionnaire Historique du Canada» vol. I, p. 849).

Les morts étaient: Joseph Coulon de Villiers, sieur de Jumonville, enseigne; de Roussel, de Québec; Caron, de Québec; Charles Bois, de Pointe-Claire; Gérôme, de Laprairie; Lenfant, de Montréal; Paris, des Mille-Isles; Languedoc, de Boucherville; Martin, de Boucherville et La Batterie, tambour. L’étrange conduite de Washington devait tourner à l’avantage des Français.

MM. de Contrecœur, de Villiers et de Longueuil délibérèrent sur ce qu’il convenait de faire pour venger la mort de leurs compagnons d’armes. On décida d’attaquer Washington, qui occupait le fort Nécessité. Le 3 juillet de la même année 1754, Washington capitulait aux mains de M. de Coulon de Villiers, frère de Jumonville.

L’année suivante, le général Braddock fut envoyé d’Angleterre avec 2 000 hommes pour déloger les Français de l’Ohio. L’objectif du général anglais était le fort Duquesne sur la rivière Monongahéla. (Dans un rapport envoyé au ministre, il est parlé du combat de la rivière Malengueulée (Monongahéla). — Édouard Richard: «Rapport sur les Archives de France,» 1899, p. 157.) M. de Contrecœur envoya M. de Beaujeu avec 250 soldats et miliciens et 650 sauvages au-devant de l’ennemi. (État joint à la lettre de Bigot du 6 août 1755. — Archives de la Marine: «Collection Moreau St-Méry,» vol. 12F, folio 116.)

La grande disproportion numérique des adversaires en présence fit hésiter les sauvages à se jeter dans la mêlée. De Beaujeu parlementa avec eux toute la nuit et réussit enfin à leur communiquer son audacieux courage. Dès le début de l’action, de Beaujeu fut tué. Jean-Daniel Dumas assuma le commandement. Ralliant ses compagnons et les sauvages, un moment découragés, il assura par son audace énergique la victoire aux Français et mit les Anglais en pleine déroute, laissant, dit-on, 900 morts ou blessés sur le champ de bataille, (9 juillet 1755).

Jamais peut-être les sauvages n’avaient ainsi puissamment aidé à remporter une victoire comme celle-ci, glorieusement gagnée par Dumas et audacieusement ordonnée par de Beaujeu, canadien de Montréal. (Le succès de Dumas, doit-il faire oublier e mérite de monsieur de Beaujeu qui avait ordonné et commencé l’action? Il ne semble pas que la victoire définitive de Sheaffe ait amoindri la mémoire de Brock, tombant vaincu sur les hauteurs de Queenstown en 1812. De Beaujeu et Brock ont tous deux pris l’audacieuse initiative du combat, dans lequel ils perdirent la vie et que leurs remplaçants couronnèrent par la victoire).

Voir aussi :

Colons pour peupler la Louisiane
Une forêt. Photo de Megan Jorgensen.

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