Contrat de mariage en Nouvelle-France

Contrat de mariage et questions de préséance en Nouvelle-France

« …Le contrat de mariage sous le régime français réunissait presque autant de parents et d’amis que la cérémonie religieuse elle-même. Les invitations pour la signature du contrat se faisaient plusieurs semaines à l’avance et on se préparait en conséquence. Les invités n’hésitaient pas à parcourir de longues distances pour assister à cette fête, car c’était véritablement une fête.

Certains contrats de mariages reçus à Québec portent les signatures de parents et d’amis de Montréal ou d’endroits aussi éloignés. Pour nos ancêtres les distances ne comptaient pas.

La grande ambition des familles de Québec étaient d’obtenir la présence du gouverneur et de l’intendant à cette cérémonie. Le notaire, alors, avait une besogne assez compliquée à accomplir. Il s’agissait de ne pas manquer aux préséances dans l’ordre des signatures.

Chacun tenait à apposer sa signature d’après son rang. Un officier des troupes de la marine aurait été insulté si sa signature avait été placée après celle d’un simple capitaine de milice. Un conseiller au Conseil Supérieur aurait rouspété si le tabellion avait fait passer avant lui un simple marchand ou un particulier sans titre. Le notaire bien avisé préparait sa liste d’invités de longue main et quand, après la lecture du contrat, il s’agissait de prier les invités de signer, il les appelait d’une voix assurée et selon l’ordre préparé.

Mais malgré toutes ces précautions les froissements et les récriminations arrivaient souvent, et le pauvre tabellion avait fort à faire pour contenter ou satisfaire les parties lésées. On pardonnait toutes sortes de fautes, mais une injure à la préséance ne s’oubliait pas. Tous ces gens venus de leur province nus comme des vers voulaient singer la cour de Versailles.

Ce mal de préséance ne sévissait pas que dans la Nouvelle-France. Toutes les colonies de la France en étaient atteintes. On n’a qu’à parcourir l’histoire de la Louisiane pour s’assurer que là-bas aussi bien qu’ici, on se chicanait pour savoir si un officier de plume haut placé devait passer avant un officier des troupes et, souvent, un simple huissier du roi se froissait parce qu’un boucanier devenu riche lui disputait son rang dans une procession ou une cérémonie quelconque.

Nous avons vu bon nombre de contrats de mariage reçus par des notaires de Québec sous le régime français et nous devons accorder la palme, croyons-nous, à celui de Jean-François Hazeur avec Catherine Martin de Lino reçu par le notaire Chambalon, le 4 mars 1708, pour le nombre des signatures.

Le notaire Chambalon donne les noms de chaque invité avec sa qualité, ses titres, sa relation de famille avec le futur marié et la future mariée, etc. Il va sans dire que chaque invité signe dans l’ordre de préséance établi, après le gouverneur, l’intendant, et les parents les plus rapprochés. Le contrat de mariage en question compte près de dix pages, dont deux entièrement consacrées aux signatures.

Vétille que tout cela, direz-vous peut-être. N’oublions pas toutefois que chaque âge a ses qualités et ses défauts. Nous nous battons parfois aujourd’hui pour des théories peut-être plus ridicules que de simples questions de préséance. »

(D’après Pierre-Georges Roy. Bulletin des Recherches Historiques. 1929).

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Femmes de la Nouvelle-france. Photographie d'Histoire-du-Quebec.ca.
Femmes de la Nouvelle-France. Photographie d’Histoire-du-Quebec.ca.

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