L’effort de guerre et la conscription
Le Canada a besoin de soldats. On ouvre partout de bureaux où on accepte les volontiers. Au milieu du mois de décembre 1939, un premier contingent arrive en Angleterre. On soumet ces recrues à un entraînement intensif et, dès l’été, elles sont prêtes à se battre.
L’industrie canadienne se met en marche. Il faut bien fournir aux soldats habits et chaussures. Les hommes étant partis pour la guerre, on fait appel aux femmes pour prendre la relève dans l’industrie. On accepte de changer la loi qui interdit aux femmes de travailler la nuit. Plusieurs d’entre elles besognent dans les manufactures 12 heures par jour.
La conscription
Au printemps 1940, les troupes allemandes avancent en Europe et envahissent le Danemark, la Norvège, la Belgique, la Hollande et le Luxembourg. Le 14 juin 1040, la France signe l’armistice. Le 18, King demande que le service militaire devienne obligatoire au Canada. Il promet cependant que les nouveaux effectifs seront attachés à la défense du territoire canadien. C’est ici que Camillien Houde, maire de Montréal, va faire une déclaration devenue historique. Le 2 août 1940, il dit devant les journalistes : « Je me déclare péremptoirement contre l’enregistrement national qui est sans aucune équivoque une mesure de conscription… Et je demande à la population de ne pas s’y conformer… Quelques jours plus tard, il est arrêté et expédié au camp d’internement de Petawawa.
Les soldats manquent. En 1942, la pression augmente. À Ottawa, on regrette la promesse de ne pas recourir à la conscription. Au début d’avril, King fait adopter un projet de plébiscite pancanadien pour demander à la population de le délier de sa promesse. La consultation a lieu le 27 avril. La question : « Consentez-vous à libérer le gouvernement de toute obligation résultant d’engagements antérieurs restreignant les méthodes de mobilisation pour le service militaire? « Le Québec vote non NON à 71,2%; le reste du Canada, OUI à 80%.
La conscription sera donc décrétée. On en retarde toutefois le moment. Durant la campagne plébiscitaire, des Québécois mettront sur pied la Ligue pour la défense du Canada, qui exhorte la population à voter non. Le premier ministre Godbout mange ses pas. « Qui peut affirmer que demain le Canada ne sera pas la première victime d’Hitler? Qui peut dire que demain, nos femmes et nos enfants ne seront pas les victimes comme l’ont été les femmes et les enfants des pays envahis? Véritablement, ce dernier effort doit être fait pour gagner la guerre. » Il demande de voter oui. Il ajoute : « Si demain, M. King me commande de traverser en Europe pour être cireur de bottes des soldats, j’irai joyeusement. » Il est bon de rappeler que le cardinal Villeneuve ne se gênera pas pour lancer un appel à la guerre sainte.
En effet, le danger augmente. En mai 1942, des sous-marins allemands rôdent dans les eaux du Saint-Laurent. Un bâtiment est coulé dans le golfe. À Gaspé, trois navires subissent le même sort. On rapporte qu’en 1942 les U-Boats allemands ont détruit 19 cargos canadiens et deux bâtiments de guerre. En août 1943, King, Roosevelt et Churchill se réunissent au Château Frontenac, à Québec. Il est question de l’offensive alliée en Italie et du débarquement en Normandie. En 1944, c’est la conscription. King convoque une réunion spéciale du Parlement, qui débute le 22 novembre; le décret qui autorise l’envoi de conscrits en Europe est voté. Trois députés libéraux canadiens-français quittent le Parti libéral et un ministre démissionne. C’est le général Andrew George Latta McNaughton qui, constatant les pertes énormes subies en France au cours des mois précédents, demande l’envoi d’au moins 16 mille soldats.
Cette guerre, qui prend fin le 7 mai 1945 à 11 heures 45, aura des répercussions énormes sur la vie politique canadienne. On assistera à la formation de nouveaux partis politiques et chez nous, au Québec, à la remontée de l’Union nationale de Maurice Duplessis.
(Source : Marcel Tessier raconte, chroniques d’histoire, Éditions de l’homme, 2000. Tome 1).
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