Les concessions de Trudeau à Davis ont ruiné les espoirs des francophones hors Québec
Concessions de Trudeau : Ottawa, 8 octobre 1980. — Par les concessions qu’il a faites au gouvernement Davis, le premier ministre Trudeau a vidé sa réforme constitutionnelle de l’intérêt qu’elle pouvait avoir pour les francophones hors Québec.
Selon le secrétaire général de l’Association canadienne-française de l’Ontario (ACFO). M. Gérard Lévesque, « les changements constitutionnels proposés par le gouvernement libéral ne modifieront à peu près pas la situation des minorités de langue française, particulièrement en Ontario et au Manitoba ».
«Nos droits fondamentaux ne sont pas dans le projet déposé en Chambre des Communes cette semaine a ajouté M. Lévesque. on y trouve seulement le droit à l’éducation dans notre langue alors que cela existe déjà ici.» La preuve de ça dit-il, c’est que nous avons 100,000 élèves inscrits à des écoles primaires et secondaires de langue française, mais ce n’est pas là le fonds de la question.
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Ce que l’ACFO réclame au nom des quelque 450,000 francophones de l’Ontario, c’est le droit de posséder et de diriger s e s propres institutions et de recevoir des services en français du gouvernement de la province exactement comme les Anglo-québécois peuvent le faire même sous la loi 101. Contrairement à ce qui se passe au Québec, les Francoontariens n’obtiennent que des services très restreints, sans avoir l’assurance qu’ils se poursuivront, ce qu’ils interprètent comme de simples privilèges et non des droits.
Dans le projet initial de rapatriement et d’amendement de la constitution du gouvernement Trudeau, au moins une disposition envisageait d’étendre le bilinguisme obligatoire à la législature ontarienne et à certains services publics. Or à la suite des tractations de dernières minutes et des deux interventions de M. Davis lors de la conférence des premiers ministres en septembre dernier, ces dispositions sont tombées.
Lors de la conférence de presse télévisée où il annonçait le plan d’action de son gouvernement, M. Trudeau devait d’ailleurs reconnaître qu’il s’agissait d’un recul en ce qui a trait aux droits des minorités francophones, recul imputable à l’opposition des provinces, disait-il.
Fédération des francophones
Pour la Fédération des francophoneshors Québec, mouvement qui regroupe les associations des neuf provinces et dont l’ACFO est la plus importante des composantes, «le projet Trudeau est très décevant puisqu’il ne répond pas aux besoins des francophones en situation minoritaire».
Selon un porte-parole de la Fédération, la reconnaissance de l’existence des deux peuples fondateurs partout au Canada et l’inscription des droits linguistiques individuels et collectifs sont douloureusement absentes de la résolution ministérielle.
Loin de reconnaître les deux peuples fondateurs dans son projet de réforme de la constitution, le gouvernement Trudeau n’en souffle pas mot. Pire encore diramême un recherchiste de la Fédération qui trait e des questions constitutionnelles, M. René-Marie Paiement, le Secrétaire d’État Francis Fox est même venu dire au congrès de l’ASCFO qu’il fallait oublier cette «théorie de folklore tricotée serrée».
À l’instar l’ACFO, la fédération réclame depuis des années que l’on ajoute les droits linguistiques individuels et collectifs à la constitution canadienne. Or il n’en est rien dans ce projet que M. Trudeau désigne comme un début.
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«M. Trudeau nous dit que c’est une amorce, soutient M. Paiement. Il y en avait aussi une dans la constitution de 1867. Elle garantissant en fait des droits aux Franco-manitobains et on sait ce qui est arrivé. Pas une province ne se sentira obligée d’agir à la suite de l’adoption des changements de M. Trudeau dit-il, la seule chose qui changera c’est la section de la Loi 101 touchant les anglophones.»
Depuis le début de l’été le gouvernement libéral tente précisément de justifier son action. Il s’appuie sur la sauvegarde des minorités francophones. Il affirme que l’insertion des droits linguistiques, leur «enchâssement dans la constitution» réglerait leurs problèmes et assurerait leur avenir. Cette ligne d’attaque du gouvernement Trudeau risque d’être battue en brèche d’ici une quinzaine de jours. Alors que les exécutifs des diverses associations de groupes minoritaires se réuniront pour prendre position sur le projet gouvernemental.