Les Clear Grits ou la French Domination
Les Clear Grits, c’était un parti (ou un mouvement) réformateur et radical du Canada – Ouest (Haut – Canada ou Ontario) qui dénonçait la politique du gouvernement du Canada-Uni qui, selon ses membres, imposait la domination francophone (French Domination). Fondé au début des années 1850, ce parti (de « clear » – dégagé, tenace, dédié, ouvert, libre et « grit » – grincer les dents. Ce nom vient d’une expression de David Christie, membre du partie, qui fait référence à un type de sable clair utilisé dans la maçonnerie pour fabriquer des pièces solides et robustes. Il était composé des anglophones anticatholiques, anti-apistes et avant tout francophobes.
Dirigés par George Brown (1818-1880), éditeur torontois, les Clear Grits se mirent à attaquer férocement les institutions du Canada-Uni afin de dominer les Canadiens français.
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Le 22 novembre 1850, lord Elgin écrit dans un message à l’intention de Foreign Office :
« Chaque jour, la haine du parti Clear Grit pour les francophones se manifeste de plus en plus ouvertement. M. Boulton, ex-juge en chef de Terre-Neuve et une sorte de leader parmi les Clear Grits a, dit-on, déclaré lors d’un dîner public l’autre jour que «les nègres sont la grande difficulté des États-Unis et les Canadiens français celle du Canada», un sentiment qui est de nature à s’arrêter dans le gosier d’un peuple passablement sensible et méfiant. »
Mais les Clear Grits défendaient également des idées libérales, exigeaient des écoles non confessionnelles, préconisaient le suffrage universel masculin, des réductions des dépenses publiques, l’abolition des réserves du clergé, le libre-échange avec le États-Unis. Quant aux institutions démocratiques, les Clear Grits ont partagé de nombreuses idées avec Thomas Jefferson. Ils demandaient l’annexion au Canada des territoires de l’Ouest. De même que la représentation proportionnelle à la Chambre, le scrutin secret et universel et un conseil législatif électif.
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En fait, les anglophones se sentaient frustrés de faire élire un nombre égal de députés anglophones et francophones: le Canada – Ouest (Ontario) dépassait de plus de 60 000 habitants la population du Canada – Est (Québec) et avec l’immigration anglaise croissante qui accentuait l’écart démographique entre le Canada – Est et le Canada – Ouest, la situation politique se détériorait. Les anglophones exigèrent donc des changements constitutionnels qui leur assureraient la représentation proportionnelle au Parlement.
En 1856, George Brown décrivait ainsi la situation qui régnait à l’Assemblé législative du Canada-Uni:
« Nous avons deux pays, deux langues, deux religions, deux façons de penser et d’agir. La question est de savoir s’il est possible de maintenir ces deux nations avec une seule législature et un seul Exécutif. Voilà la question à résoudre. »
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Ce sont les Clear Grits qui proposèrent une fédération entre toutes les colonies britanniques de l’Amérique du Nord dans le but de freiner la « French Domination ». Ils avaient besoin d’ailleurs du Québec, car ils tenaient beaucoup aux canaux, aux chemins de fer et au port de Montréal.
L’idéal pour les Clear Grits, c’était deux provinces séparées au plan des institutions culturelles et politiques, mais reliées par un marché économique commun.
Les Clear Grits devinrent majoritaires dans l’électorat du Canada – Ouest (ou Haut – Canada), car en s’opposant au capitalisme ils avaient obtenu le soutien de nombreux paysans, agriculteurs et ouvriers. Mais dans le Bas-Canada (ou le Canada – Est), l’attitude francophobe des Clear Grits poussa de nombreux citoyens de tendance libérale à se joindre aux conservateurs.
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En 1857, les Clear Grits forment le Parti réformiste. En 1864, George Brown propose aux chefs conservateurs des deux Canadas de constituer avec les libéraux du Canada – Ouest un gouvernement de coalition qui serait en faveur d’une union fédérale des deux provinces. George – Étienne Cartier, le chef des réformistes du Canada – Est, se joint à la coalition et participe activement au projet fédératif. C’est la «Grande Coalition», comme on l’appellera plus tard, qui réunissait trois des quatre principaux groupes politiques du Canada-Uni : les conservateurs anglophones de John Macdonald, les conservateurs francophones de George – Étienne Cartier et les réformistes de George Brown.
Les Clear Grits formèrent donc le noyau du Parti libéral de l’Ontario et du Parti libéral du Canada. Quelques-uns, partisans des Fermiers unis et du Coopérative Commonwealth Federation deviennent l’ancêtre direct du Nouveau Parti démocratique.
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