Bourassa dit « non » à la charte constitutionnelle

Bourassa dit « non » à la charte constitutionnelle

Québec. – Après deux jours de pourparlers incessants avec ses ministres et ses députés, le premier ministre du Québec, M. Robert Bourassa, a finalement annoncé cette nuit l’une des décisions les plus importantes de sa carrière politique : celle de répondre « non » au projet d’une « charte constitutionnelle canadienne » soumise la semaine dernière par M. P.E. Trudeau, à Victoria.

M. Bourassa a révélé qu’il avait pris dès la fin de semaine dernière la décision de refuser le projet fédéral. « C’est une décision qu’un premier ministre doit tout d’abord prendre seul. J’ai ensuite communiqué formellement au conseil des ministres et à la réunion des députés la décision du chef du gouvernement. Celle-ci fut acceptée après étude.

Le premier ministre a su, jusqu’à la dernière minute, à 2 heures ce matin (23 juin 1971), imposer la consigne du silence à ses troupes et maintenir le suspense autour de la décision du gouvernement québécois. Il a fait parvenir un communiqué à la presse aux petites heures du matin et est ensuite venu rencontrer de façon impromptue les journalistes de la Tribune de la Presse.

Il leur a révélé que, quelques instants plus tôt, il avait fait connaître à M. Trudeau, de passage à Toronto, la décision de son cabinet de ne pas recommander l’adoption du projet de charte à l’Assemblée nationale. M. Bourassa n’a voulu donner aucun indice des réactions du chef fédéral.

Fin de la révision

Par ailleurs, de façon globale, M. Bourassa n’a pas voulu élaborer sur sa déclaration écrite aux journaux, affirmant qu’il préférait répondre d’abord aux questions que lui poseraient aujourd’hui à l’Assemblée nationale les députés d’opposition.

M. Bourassa a incidemment écarté les propos pessimistes selon lesquels le refus du Québec, tel que prédit par M. Trudeau, mettrait fin pour un certain temps à la révision constitutionnelle.

« Nous verrons », a-t-il dit en soulignant qu’aucun des premiers ministres provinciaux à Victoria n’avait conclu que le refus d’une province au projet fédéral de charte constitutionnelle mettrait totalement fin à toute négociation constitutionnelle. Certes, ce pourrait être le statu quo pour « un certain temps » en matière de révision mais M. Bourassa a souligné qu’un processus de « négociations bilatérales » avait bel et bien été instauré à la conférence fédérale-provinciale de septembre 1970.

Un an plus tôt, jour par jour, autrement dit la veille de la Saint-Jean-Baptiste, le gouvernement Trudeau divulguait sa décision d’endosser les grands objectifs de la commission Laurendeau-Danton sur le bilinguisme et le biculturalisme, notamment en ce qui concernait l’utilisation du français dans la fonction publique fédérale, les forces armées et le secteur privé de l’industrie.

(23 juin 1971).

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Parler d’un pays. Photo : © Histoire-du-Québec.ca.

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