Argentine en 1819 – 1820 – Article analytique de l’époque
Argentine en 1819 – 1920. Texte originel, tiré du journal Le Boréal Express, 1820.
Buenos Aires. Les Provinces-Unies du Rio de la Plata auront donné, durant l’année qui s’achève, la pleine mesure de leur désunion. L’ancienne vice-royauté de la Plata, créée par Charles III en 1776, menace sérieusement de se désintégrer en une série d’États rivaux.
Le mouvement d’émancipation avait pourtant débuté sous des auspices favorables, dans cette région relativement isolée de l’Amérique australe. En 1806-1807, les milices de Buenos Aires, commandées par le vaillant Santiago Liniers, tenaient en échec deux invasions britanniques.
L’exaltation patriotique ainsi déclenchée avait en quelque sorte préparé les esprits aux graves événements de 1808. En apprenant l’agression napoléonienne contre la mère patrie, et l’abdication du bien-aimé Ferdinand VII, Buenos Aires suivit l’exemple de Charcas, de Quito, de Bogota, de Caracas. . . Les Créoles forcèrent le vice-roi Cisneros à s’éclipser au profit d’une Junte coloniale, en mai 1810. Cette Révolution de Mayo fut, à vrai dire, une révolution tranquille.
Argentine en 1819 – 1920
Les membres de la Junte surent ménager les étapes. Tout en se déclarant autonomes face aux autorités espagnoles, ils continuèrent d’affirmer leur fidélité à Ferdinand VII. Ce n’est que le 9 juillet 1816, au Congrès de Tucumân, que les Provinces-Unies proclamèrent enfin leur indépendance.
À cette date, elles étaient en effet les seules à échapper à la contre-offensive métropolitaine. Elles avaient repoussé plusieurs attaques loyalistes en provenance du Haut-Pérou. Et c’est à même leurs ressources que San Martin pouvait organiser, de 1814 à 1817, la mémorable traversée des Andes qui conduisit à la libération du Chili. Donc, une émancipation pleinement réussie.
Le Rio de la Plata, cependant, n’a pas encore résolu son problème de constitution interne. Les difficultés naissent de la rivalité opposant le port de Buenos Aires aux provinces de l’intérieur. Contrôlant l’estuaire du grand fleuve, et ouverte désormais sans restrictions au commerce international, la capitale a tenté d’imposer à la fédération une lourde hégémonie.
Aussi les provinces de Santa Fe, d’Entre Rios et de Corrientes se sont-elles abstenues de participer au Congrès de Tucumân. Ce dernier n’a d’ailleurs pas réglé grand chose en ce qui concerne le futur système politique du pays. Il a du moins écarté le projet fantaisiste de Manuel Belgrano, visant à restaurer l’Empire des Incas. Et il a nommé comme Suprême Directeur de la Confédération M. Juan Martin Pueyrredôn. Le Directeur était un monarchiste convaincu.
Les négociations secrètes menées sous son administration pour installer au Rio de la Plata un prince français ou espagnol ont échoué définitivement l’an dernier, et le scandale en a été dévoilé au public. En même temps, Pueyrredôn est allé trop loin dans le sens de la centralisation.
La constitution de 1819 s’est heurtée au veto des despotes locaux : Martin Guiemes à Salta, Arâoz à Tucumân, Ramirez dans la province d’Entre Rios, Estanislao Lôpez à Santa Fe. En butte à l’opposition de ces quatre hommes forts, Pueyrredôn a cru plus sage de démissionner, en juin 1819. Le départ du Directeur ouvrait la porte à l’anarchie. En effet son successeur, le général Rondeau, ne fut pas mieux accepté par les despotes de l’intérieur. Le conflit s’est envenimé rapidement. Si bien qu’en février dernier, les gauchos de Santa Fe et d’Entre Rios ont écrasé les troupes de Buenos Aires à la bataille de Cépeda. Leur victoire risque de consacrer le morcellement du territoire. Chaque province jouit maintenant d’une pleine autonomie, et se considère comme souveraine. Il a bien été question d’une nouvelle constitution – vraiment fédérale, cette fois. Mais Buenos Aires semble incapable de jouer, avant longtemps, le rôle de noyau unificateur.
La ville est en proie à une instabilité chronique : sept gouverneurs se sont usés à la tâche depuis la débâcle de février ! Un huitième, le général Martin Rodriguez, a été nommé en septembre. Il paraît déterminé à tenir bon et est parvenu à rétablir un calme relatif. La crise, néanmoins, est loin d’être conjurée.
Dans un tel contexte, la menace portugaise se révèle singulièrement redoutable. La province de la “Banda Oriental”, avec sa capitale de Montevideo, vient en effet de tomber aux mains du roi Dom Joao. Le patriote Gervasio Artigas, débordé par les forces venues du Brésil, trahi par ses lieutenants, abandonné par Buenos Aires, a perdu la bataille de Tacuarembô. Il s’est réfugié, dit-on, au Paraguay sous la protection du Dr Francia.
Aux dernières nouvelles, le Royaume-Uni du Portugal, du Brésil et des Algarves se disposerait à annexer la Banda Oriental. Année décevante, en vérité, pour le Rio de la Plata.
(Tiré du Boréal Express, Montréal, 1820, volume 5, numéro 5, page 2).
Visages pâles et peaux rouges
Les Espagnols qui les premiers débarquèrent en Amérique, massacrèrentles Aborigènes comme s’ils eussent été des bêtes féroces. Les Anglais ne s’en occupèrent pas, sauf quand ils contrecarraient leurs projets. Mais les Français ont toujours essayé de s’en faire des amis.
(Child’s Study : Canada, par J.-N. McIlwraith.)
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