Aperçu de l’état économique de la Nouvelle-France au XVIIIe siècle
État économique de la Nouvelle-France : L’intendant Raudot, dans un mémoire, adressé en 1708 au ministre de France, M. de Pontchartrain, résumait la situation économique générale du pays. La ville de Montréal, déjà la métropole commerciale du Canada, apparaît comme au premier plan des observations de l’intendant. C’est l’objet principal de ses préoccupations d’avenir. L’exposé succinct de la situation prend ici caractère de formule couvrant toute cette époque. À nos propres observations sur le sujet, nous mêlons volontiers la substance du mémoire de l’intendant. ( «Mémoire sur les affaires du Canada, par M. Raudot,» 16 juillet,— Edouard Richard; « Rapport sur les Archives de France, 1899, p. 219).
Le commerce du castor — dont Montréal était le centre — sur lequel a pivoté la prospérité du Canada, est nécessairement une ressource précaire.
Tôt ou tard devait résulter la rareté du produit ou le fléchissement du prix. La colonie souffre actuellement du dernier inconvénient. Le monopole, rétabli en 1721, ne devait pas corriger cet abus dont souffraient les traitants particuliers. L’agriculture, qui devait être l’objet principal des habitants, a été plutôt l’accessoire.
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Le castor a toujours été considéré ici comme la mine d’or à exploiter; chacun a voulu en prendre sa part. C’est le contraire qui s’est fait dans les colonies anglaises. Ici les habitants ont couru les bois, préférant cette vie aventureuse, qui leur rapportait beaucoup de profits pour peu de travail, à la culture de la terre qui exige un labeur assidu. Il en est résulté des habitudes d’oisiveté, de négligence, si funestes à la vie rurale.
Analysant ensuite la situation des établissements, Raudot dit qu’il y a une assez grande quantité de bestiaux, une bonne aisance quant à la nourriture, mais grande gêne quant à l’habillement.» Le commerce du pays roule sur la somme de 650 000 livres, et c’est à même cette somme que doivent se solder les achats faits en France et se maintenir le mouvement quotidien du travail et des échanges locaux. C’est peu de chose pour une population de 18 à 20 000 âmes, dont 4 ou 5 000 à Montréal seulement.
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Autrefois cette somme était beaucoup plus forte, avec moins de monde pour se la partager. Tout se paye par traites sur Paris, de sorte que l’argent ne passe même plus de ce côté. Les marchandises sont très chères, et l’habitant ne veut travailler que
pour un gros salaire, disant qu’il use plus de hardes au travail qu’il n’en peut gagner.
Pour remédier à cet état de choses alarmant, qui empêche la colonie de progresser, l’intendant propose de pousser davantage la population à la production du blé, à l’élevage des bestiaux, à l’exploitation des forêts et des pêcheries, à la fabrication des huiles, à la construction des vaisseaux, pourvu que l’on s’occupe en France de trouver des marchés pour tous les produits du Canada. Il ne faut pas trop s’attacher à l’intérêt présent de la France, celui du Canada comme sa prospérité devant tôt ou tard se confondre avec ceux de la mère patrie.
Montréal souffrait moins que les autres établissements des inconvénients que mentionne Raudot dans son mémoire. En fait la ville bénéficiait directement du trafic de l’Ouest et des nombreux voyages, dont les ravitaillements de toutes sortes activaient le commerce de la ville.
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