Alfred de Vigny : Écrivain et lac

Alfred de Vigny : Écrivain français et lac au Québec

En 1989, dans le cadre de sa politique de désignation commémorative et à la demande de l’Association des Amis d’Alfred de Vigny, la Commission de toponymie du Québec rendait homme à cet écrivain français, liant son nom à un lac situé dans la réserve faunique de Sept-Îles-Port-Cartier. D’une longueur de 6 kilomètres, plutôt étroit et échancré dans sa partie supérieure, le lac Alfred-De-Vigny possède la particularité de ressembler à une hache ou à une clef. Les pêcheurs, provenant de la ville de Port-Cartier, située à 55 kilomètres au sud-est, de Sept-Îles ou d’ailleurs, y trouvent en abondance de la truite mouchetée (omble de fontaine). Ils doivent cependant s’y rendre en hydravion ou en canot, puisque le lac n’est pas accessible par la route.

Amoureux de la nature, Alfred de Vigny aurait certainement aimé l’emplacement de ce lac désigné en son honneur. Issu d’une famille noble qui lui a inculqué la fierté de ses origines, le culte des armes et de l’honneur, celui-ci vit le jour en 1797, à Loches, en Indre-et-Loire, dans une région riche d’histoire, de bons vins, de châteaux et d’art. D’abord militaire, Vigny du mener la vie terne et monotone de la garnison. Déçu, il quitta l’armée en 1927. Elle lui avait tout de même permis de développer son sens de l’honneur, son abnégation et, en corolaire, son stoïcisme. Ses premières œuvres, des poèmes, furent écrites en 1822, à une époque où il fréquentait assidûment les cénacles romantiques. Trois ans plus tard, il se maria avec une Britannique, Lydia Jane Bunbury. Ce mariage lui permit de connaître le Canada et particulièrement ses habitants d’expression française, lui qui possédait déjà d’étroits liens de parenté avec les Montcalm et les Bougainville, lesquels avaient vécu les dernières années de la Nouvelle-France.

Lac Alfred-de-Vigny
Lac Alfred-de-Vigny. Source de l’image : Cartes Google.

Mais c’est en Angleterre qu’Alfred de Vigny comprendra la réalité des anciens sujets du roi de France. De passage à Londres, en novembre 1838, afin d’occuper des affaires de la succession de son beau-père, il assista, indigné, à une réunion de la Chambre des Lords durant laquelle le comte de Durham affirma « la nécessité absolue d’étouffer une nation française de 450 000 âmes » au Canada. De retour à Paris, Vigny fit la connaissance de Louis-Joseph Papineau, ancien président de l’Assemblée législative du Bas-Canada et, un peu malgré lui, chef de la rébellion des Patriotes de 1837. Cette insurrection, écrasée par les Britanniques, avait amené Durham au Canada et ce dernier avait recommandé, dans son fameux rapport, l’assimilation des Canadiens-français et l’union des Haut et Bas-Canada. Fort de témoignages du Canadien et du britannique, dont il lut le rapport, Vigny entreprit la rédaction de Français du canada, œuvre publiée, quoique inachevée, longtemps après sa mort, survenue à Paris en 1863.

Considéré comme le penseur de l’école romantique française, Alfred de Vigny a toujours regretté que ses compatriotes aient oublié totalement le Canada. Il faudra attendre 1855 pour que les relations commerciales et culturelles entre la France de Napoléon III et le Canada soient officiellement renouées.

L’auteur français influencera également des écrivains québécois de l’époque, dont le poète Octave Crémazie (1827 – 1879), chef de file du mouvement littéraire romantique au Québec.

L’odonymie québécoise honore aussi Alfred de Vigny, puisque l’on retrouve des voies de circulation portant son nom à Montréal, Québec, Laval et Mascouche. Il en va de même en France, notamment à Paris, où l’écrivain s’installa au début du XIXe siècle, et à Tours, capitale de la Touraine et préfecture du département dans lequel il est né et a vécu ses premières années, l’Indre—et-Loire.

Pessimiste sans grandes illusions, Vigny incarne les affres, les doutes et les tourments de cette période du romanticisme français. Il estimait que les sentiments généreux étaient rarement récompensés. Sa vision des hommes et des choses de l’époque de Charles X, de la Monarchie de Juillet et du Second Empire sera empreinte de désabusement, de résignation, voir de fatalisme.

(Source : Commission de toponymie du Québec, Commission nationale de toponymie de France, les Publications du Québec, l’Association française pour l’information géographique, 1999).

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Portrait d’Alfred de Vigny. Image libre de droits.

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