Adoption chez les Amérindiens

Adoption chez les Amérindiens

La condition d’un esclave à qui l’on donne la vie est toujours assez dure chez les nations algonquines; mais parmi les Iroquois et les Hurons, elle est aussi douce à proportion que celle de ceux qu’on jette au feu est cruelle. Dès qu’il est entré dans la cabane où il est donné et où l’on a résolu de le conserver, on détache ses liens; on lui ôte cet appareil lugubre, qui le faisait paraître comme une victime destinée au sacrifice; on le lave avec de l’eau tiède pour effacer les couleurs dot son visage était peint, et on l’habille proprement.

Il reçoit ensuite les visites des parents et des amis de la famille où il entre. Peu de temps après on fait festin à tout le village pour lui donner le nom de la personne qu’il relève. Les amis et alliés du défunt font aussi festin en son nom pour lui faire honneur. Dès ce moment il entre dans ses droits. Si l’esclave est une fille donnée dans une cabane, où il n’y ait point de personne du sexe en état de la soutenir, c’est une fortune pour cette cabane-là et pour elle. Toute l’espérance de la famille est fondée sur cette esclave, qui devient la maîtresse de cette famille, et des branches qui en dépendent. Si c’est un homme qui ressuscite un Ancien, un considérable, il devient considérable lui-même, et il a de l’autorité dans le village s’il sait soutenir par son mérite personnel le nom qu’il prend.

À la vérité les esclaves, s’ils sont sages, doivent se souvenir de l’état où ils ont été, et de la grâce qu’on leur a faite. Ils doivent se rendre agréables par leur complaisance, autrement leur fortune pourrait changer, même après plusieurs années d’adoption, surtout si les familles o;y ils sont entrés sont nombreuses et peuvent aisément se passer d’eux. Mais leurs maîtres, quoiqu’ils sentent bien leur supériorité, ne la leur font point sentir, ils s’appliquent, au contraire, à leur persuader qu’étant incorporés dans leurs familles ils sont les maîtres comme s’ils étaient dans leur propre, et qu’ils sont entièrement semblables à eux.

Quelquefois même ils leur disent qu’il leur est libre de rester ou de retourner dans leur pays : ce parti serait néanmoins dangereux à prendre si on pouvait le pressentir, et leur coûterait infailliblement la vie, s’ils avaient le malheur d’être pris une seconde fois.

Une conduite si douce des Iroquois envers leurs esclaves est l’effet d’une excellente politique; car ces esclaves ne voyant presque point de différence entre les Iroquois, naturels et eux-mêmes ne s’aperçoivent aussi presque point de leur servitude, et ne sont point tentés de s’enfuir. Les nations elles-mêmes à qui l’Iroquois fait la guerre, ou qui sont pressés d’ailleurs par des voisins inquiets ne se sentant pas en état de résister aux uns et aux autres, écoutent plus volontiers les propositions que les Iroquois leur font faire de se donner à eux pour ne faire ensemble qu’un même peuple; et c’est ainsi que ceux-ci obtiennent plus facilement les deux points qui leur sont les plus essentiels, qui sont de soutenir leurs familles chancelantes, et de grossir leur nombre; ce qui leur donne la supériorité qu’ils ont depuis si longtemps sur les autres nations.

Voir aussi :

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Fleurs blanches. Source de l’image: Histoire-du-Québec.ca.

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