Moyenne de Dow-Jones
Causerie prononcée le 5 mars 1958 par le Dr Arthur Gagnon, professeur en biochimie à la faculté de médecine, devant les membres du Club de Placement Unimont qui pour la plupart font partie du personnel administratif ou enseignant de l’Université.
Dow-Jones doit leur nom à la maison Dow-Jones and Co., fondée par Charles H. Dow, journaliste financier. Les moyennes Dow-Jones parurent dès 1884 dans une lettre quotidienne que publiait la Maison Dow-Jones et ensuite, à partir de 1889, dans Wall Street Journal, dont Dow lui-même fut le premier éditeur.
Au début, la première moyenne Dow-Jones, est une moyenne arithmétique de onze valeurs choisis parmi les plus représentatives, et dont neuf étaient des compagnies de chemin de fer. El devint bientôt une moyenne de douze valeurs par addition du Delaware and Hudson, et ensuite une moyenne de vingt valeurs par addition de huit autres compagnies de chemin de fer.
À cette époque, en Amérique, les chemins de fer étaient un baromètre assez fidèle des affaires.
Puis, certaines industries commencèrent à s’imposer, comme par exemple : l’industrie du tabac, de l’acier, du whisky, du sucre, de l’huile, etc.
C’est pourquoi, à partir de 1895, le Wall Street Journal publie deux moyennes Dow-Jones ; l’une compilée à partir de vingt chemins de fer et l’autre à partir de 12 industrielles. En 1928 le Dow- Jones industriel devient une moyenne arithmétique de trente valeurs et en 1929 une troisième moyenne Dow-Jones fait son apparition: c’est celle des utilités.
Plusieurs remaniements et ajustements par la suite furent effectués et conduisirent aux quatre moyennes Dow-Jones, au cours des années 1950 : celle des 30 industrielles celle des 20 chemins de fer celle des 15 utilités celle des 65 valeurs combinées.
Calcul d’une moyenne Dow-Jones
Prenons comme exemple celle des 30 industrielles. On inscrit par exemple le prix de fermeture de chacune des trente valeurs et on en fait la somme. Ensuite, il viendrait tout naturellement à l’esprit de diviser cette somme par 30 pour obtenir la moyenne. Mais en réalité la somme obtenue, disons $1,884.52 doit actuellement être divisée par le facteur 4.283.
$1,884.52 : 4, 283 = $440.
Dans ce cas hypothétique, la moyenne Dow-Jones industrielle aurait une valeur de 440. Même si cette valeur peut être exprimée en dollars, il ne faut pas oublier que nous sommes en face d’une moyenne arithmétique corrigée, puisque nous avons divisé la somme totale non pas par 30 mais par le facteur 4.283. Cette remarque s’applique aux autres moyennes Dow-Jones dont le calcul se fait d’une façon identique en employant les facteurs appropriés.
Provenance du facteur 4.283
Lorsqu’une moyenne arithmétique de trente valeurs est calculée, au départ on doit utiliser le nombre 30 comme diviseur. La valeur de la moyenne va continuellement varier suivant les fluctuations du prix des actions.
Mais, disons qu’un soir elle ferme à 150, ce qui correspond à un total de $4,500. pour les 30 valeurs.
L’une de ces trente valeurs peut bien s’être vendue ce jour là à $200. l’action. Si le lendemain cette compagnie dont l’action se vend $200. décide de diviser ses actions à 10 pour une, la nouvelle action se vendra à $20, et la somme des 30 valeurs sera maintenant $4,320, au lieu de $4,500. Si on continuait de diviser par 30 on trouverait une moyenne de 144, laissant croire que le marché a baissé alors qu’il n’en est rien. Par quel nombre faudra-t-il diviser ce nouveau montant $4,320. pour que la moyenne ne fasse pas de chute indue? Le facteur se calculerait ainsi :
$4,320 : 150 = 22.8
En fait, ce phénomène s’est produit si souvent dans le cas de la moyenne Dow-Jones des 30 industrielles, que le diviseur de 30 qu’il était au début est rendu à 4.283. Il est important de toujours avoir ce fait présent à l’esprit. Far exemple si dans une semaine l’indice passe de 440 à 450, il ne faut pas penser que les trente valeurs se sont appréciées d’une moyenne de $10 chacune.
En réalité, la somme des trente valeurs a mont« d’une quantité qui divisée par 4.283 a donné $10. Cette somme a donc monté de $42.83, résultat des gains effectués par les 30 valeurs. Chaque action a donc monté en moyenne de $1.43 et non pas d 10 dollars !
En corrigeant ainsi pour les « splits » on donne aux moyennes une bonne continuité, mais elles subissent quand même une certaine distorsion.
Provenance de la distorsion
Dans une moyenne arithmétique chaque valeur n’a pas une même influence, ne pèse pas également sur la moyenne.
Dans une liste de 30 valeurs, il y en a qui peuvent se vendre à $150, l’action et d’autres à $5 l’action. Celle à $150 a plus d’influence que celle à $5. Si l’action de $150 s’apprécie du double cet influencera appréciablement la moyenne, tandis que l’action de $5. peut doubler et même triple: sans beaucoup affecter la moyenne.
Ainsi après un « split » même si on corrige li moyenne en changeant de diviseur, il reste tout de même que l’une des actions a perdu beaucoup de son poids dans la moyenne, tandis que les autres très en ont relativement gagné ; ceci amène de la distorsion.
Malgré ces inconvénients les moyennes Dow Jones ont une valeur réelle, parce que :
a) elles sont connues et répandues
b) elles ont une longue continuité historique
c) elles sont un outil utile pour qui sait s’en servir
d) elles ont servi de bases à plusieurs théories sur le comportement du marché.
Les moyennes Dow-Jones ne contiennent que des valeurs inscrites sur la bourse de New-York et pour cette raison reflètent particulièrement bien le marché américain.
Comparaison avec la moyenne géométrique
Une moyenne géométrique accorde un poids égal à chaque valeur qui la compose, que son prix soit faible ou élevé. On l’obtient en multipliant l’un par l’autre le prix des valeurs et ensuite en extrayant la racine nième du produit. Prenons comme exemple la moyenne géométrique de deux valeurs dont l’une vaut $4. et l’autre $25. En multipliant 4 par 25 on obtient 100 dont la racine carrée est 10. La moyenne géométrique de 4 et d 25 est donc dix. Ainsi 10 divisé par 2.5 donne et 10 multiplié par 2.5 donne 25.
La moyenne géométrique indiquerait fidèlement les variations d’un porte-monnaie comportant des montants égaux d’argent investis dans chaque valeur de la moyenne.
Par contre, la moyenne arithmétique indiquait fidèlement les variations d’un porte monnaie comportant un nombre égal d’actions dans chaîne valeur de la moyenne.
Comparaison avec l’indice de Standard Poor’s Corporation
II ne s’agit plus là d’une moyenne mais d’un indice. Cet indice est ainsi conçu qu’il évite les ajustements pour « splits », introduit une correction pour les différences de poids provenant de l’écart entre les prix des différentes actions, et une deuxième correction pour l’importance relative des valeurs sur le marché.
La théorie de Dow
Chaque moyenne ou indice a ses avantages et nies défauts. Les moyennes Dow-Jones malgré leurs défauts sont encore très précieuses, en particulier parce qu’elles ont permis à Dow d’élaborer une théorie du marché : « La Dow Theory ».
Charles Dow mourut en 1902. Sa théorie a été prolongée et modifiée par ses élèves, entre autres Hamilton. Ces derniers décèlent dans la suite les fluctuations du marché, différents mouvements qu’ils décrivent comme majeurs, secondaires ou mineurs.
Les mouvements majeurs de montée « bull markets » ont une durée moyenne de deux ans et les mouvements majeurs de descente « bear markets » ont une durée moyenne de dix-huit mois.
Les mouvements secondaires de montée ou de descente ont une durée moyenne comprise entre me semaine et deux mois.
Les mouvements mineurs sont représentés par les variations de chaque jour.
Les fervents de la théorie attachent une importance particulière à la moyenne Dow-Jones des 30 industrielles et, s’en servent pour prédire a fin et le début des mouvements majeurs.
Au cours d’un mouvement majeur de hausse, on voit que les mouvements secondaires se succèdent d’une façon particulière. Le sommet de chaque mouvement secondaire dépasse le précédent et le creux de chacun se situe moins bas que le précédent. La fin de ce mouvement majeur sera indiqué par un mouvement secondaire dont le sommet ne dépassera pas le précédent et dont le creux se situera plus bas que le précédent.
Ces observations faites avec la moyenne industrielle ne prennent toute leur valeur que si elles sont confirmées par la moyenne des chemins de fer.
Il n’est pas nécessaire que la pénétration d’un sommet ou d’un creux sur le précédent soit très marqué. Les experts considèrent qu’une pénétration d’un demi-point est significative.
Ainsi le 25 octobre 1929 Hamilton écrivait son fameux éditorial « The Turn of the Tide » après avoir observé une pénétration de seulement 0.98 point.
Théories des lignes
Les disciples de Dow décrivent aussi des périodes, qui peuvent durer quelques semaines et pendant lesquelles on n’observe ni montée ni descente du marché. Ces périodes appelées lignes sont le résultat d’un équilibre entre les disponibilités et les demandes. Lorsqu’elles se produisent au sommet d’un mouvement majeur elles indiquent une distribution des actions qui passent des gros actionnaires aux petits. Lorsqu’elles arrivent au bas d’un mouvement majeur elles indiquent une accumulation des actions qui passent des petits actionnaires aux gros.
Si les deux moyennes Dow-Jones industrielle et chemin de fer brisent la ligne par en haut, ceci laisse prévoir, prétend-on une hausse prolongée.
Au contraire les deux moyennes brisent-elles la ligne par en bas? Alors il faudrait s’attendre à une baisse prolongée.
Doubles sommets et doubles creux
Apparemment on y attache un peu moins d’importance maintenant. Toutefois ces accidents de la courbe indiqueraient que la montée ou la descente est terminée.
Comparaison entre le Dow-Jones industriel et la santé réelle des affaires
Les chutes ou les reprises de la moyenne Dow-Jones industrielle précédent en général de 6 à 7 mois les chutes et les reprises réelles des affaires.
C’est un fait bien connu que le marché des actions anticipe et exagère les événements susceptibles d’avoir une répercussion bonne ou mauvaise sur les affaires.
À titre de conclusions, relisons cette citation tirée du livre : « The Stock Market » de Dice et Eiteman dans lequel a largement puisé l’auteur de la causerie.
“Advocates of the Dow theory do not hold it to be a scientifically constructed forecasting device. Without knowing too much of its working they hold only that it does work and that it gives the trader a warning, even though tardy, to get away before complète disaster strikes him.
A man does not hâve to be smart to get off the track when he sees an express train is coming notwithstanding time-tables, guide-books, and the testimoney of the local half-wit that the Une has been abandoned. »
Janvier 1958.
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