La IIIe République : Les débuts de la IIIe République en France (1871 – 1875)
Dans l’attente d’une restauration
La IIIe République : Après la défaite définitive face à la Prusse, la République nouvelle est ébranlé par le soulèvement de la Commune parisienne et contestée par le milieux royalistes.
Proclamée le 4 septembre 1870, deux jours après le désastre de Sedan, la République échoue dans sa résistance armée contre la Prusse durant le dur hiver 180 – 1871. Paris capitule le 28 janvier 1871 et le gouvernement accepte l’armistice. Quelques jours plus tard, la nouvelle Assemblée nationale réunie à Bordeaux, charge Adolphe Thiers de signer la paix avec le nouvel Empire allemand.
Adolphe Thiers (1797 – 1877)
Il soutient Louis-Philippe en 1830, devient ministre de l’Intérieur (1832 – 1834) et chef du gouvernement en 1836. Il revient au pouvoir en 1848 et préconise l’écrasement de la Révolution. Proche du « parti de l’Ordre », il aide à l’élection de Louis Napoléon Bonaparte, mais est exilé et anime ensuite l’opposition parlementaire. Hostile à la guerre en 1870, il est chargé de chercher des soutiens en Europe. Chef de l’exécutif en février 1871, il ordonne l’écrasement de la Commune. Favorable à une République conservatrice, il est rejeté par les royalistes et doit démissionner en mai 1873.
Thiers et la Commune
L’Assemblée nationale élue le 8 février 1871 comporte une majorité royaliste ou hostile aux républicains : ceux-ci (tel Gambetta) inquiètent les milieux ruraux et modérés, car ils symbolisent la poursuite de la guerre et l’agitation sociale. Elle a nommé Adolphe Thiers chef du pouvoir exécutif de la république, en espérant que le retour de la paix permettrait celui de la monarchie après les échecs militaires du Second Empire puis des républicains.
Mais ces derniers acceptent mal les conditions de la paix et la victoire électorale de « la province ». Dans Paris, qui souffre dès avant la guerre de difficultés économiques, aggravées par la dureté du siège, des émeutes patriotiques et populaires ont éclaté pendant l’hiver et l’effervescence est permanente.
Craignant la pression des révolutionnaires parisiens, l’Assemblée nationale s’installe à Versailles, et Thiers décide, le 18 mars, de retirer de Paris les canons installés à Montmartre. Aussitôt éclate une insurrection parisienne; une partie des troupes chargées de ramener les canons passe du côté des insurgés qui contrôlent Paris quelques jours plus tard.
Le 26 mars, les Parisiens élisent un Conseil général de la Commune, où vont s’opposer des jacobins autoritaires parisiens de mesures radicales (Raoul Rigault), et des proudhoniens plus modérés favorables à la décentralisation des pouvoirs (Benoît Malon); ces derniers conçoivent l’État comme une fédération de communes autonomes. Les Communards veulent supprimer l’exploitation de l’homme par l’homme et font du drapeau rouge leur emblème. Une commission du travail est créée, des coopératives de production se constituent, des chefs d’atelier sont élus dans des usines. La Commune décide par ailleurs la séparation de l’Église et de l’État, la laïcisation de l’école publique et revient au calendrier révolutionnaire.
La Commune constitue donc une expérience originale de synthèse entre l’héritage républicain et patriotique de la révolution de 1789 et les aspirations socialistes des milieux ouvriers et intellectuels, que commencent à pénétrer à la fois des idées anarchisantes et marxistes.
Cette révolution parisienne va provoquer une répression impitoyable de la part des troupes « Versaillaises » commandées par Mac-Mahon. Du 21 au 28 mai, les Versaillais entrent dans Paris, encore partiellement encerclé par l’armée prussienne, à l’est et au nord. Les combats sont très âpres, et aux massacres d’insurgés pris par les Versaillais répondent les exécutions d’otages faits par les Communards. Les derniers Parisiens en arme et gardes nationaux « Fédérés » sont finalement écrasés à Belleville et au cimetière du Père-Lachaisse. Cette « semaine sanglante » fait environ 50 mille morts (tués au combat ou exécutés) et environ autant de procès intentés aux communards qui se tiendront jusqu’en 1875.
Orléanistes et légitimistes
Le retour à l’ordre après l’inquiétude provoquée par l’insurrection parisienne, suivie de celles de Lyon, Marseille et Saint-Étienne, crée un climat propice à une restauration. Mais si la majorité de l’Assemblée y est favorable, les monarchistes sont divisés entre « légitimistes », partisans du comte de Chambord (Henri V, petit-fils de Charles X) et « orléanistes », favorables au comte de Paris (petit-fils de Louis-Philippe). Pour les premiers, la monarchie doit être absolue et défendre les positions de l’Église romaine : le Pape Pie IX a, dans une encyclique et son annexe, le Syllabus, condamné en décembre 1864, la civilisation moderne, le libéralisme politique, les idées socialistes et la liberté de conscience, avant de se déclarer infaillible en 1870. En revanche, les seconds acceptent le principe d’une monarchie parlementaire, et se refusent à suivre les catholiques ultramontains inconditionnels. Après la proclamation intransigeante du comte de Chambord en juillet 1871, qui rend impossible une restauration immédiate, de nombreux légitimistes modérés se rapprochent du parti orléaniste.
Mais si la République est vécue par certains comme une solution d’attente, elle fait de plus en plus d’adeptes dans les différents milieux : les conservateurs sont rassurés par la présence de Thiers, nommé Président de la République en août 1871, par l’Assemblée nationale. Dans les campagnes, où l’on commence à s’inquiéter d’un retour à l’ancien Régime, le vote républicain progresse dès les élections partielles de juillet 71.
Mais bien que se proclamant républicain, Thiers ne bénéficie pas du soutien des milieux populaires, qui ne lui pardonnent pas la répression de la Commune de Paris. Il doit démissionner le 24 mai 1873, attaqué par la droite et la gauche, après plusieurs conflits l’ayant opposé à l’Assemblée nationale et qui débouchent finalement sur des compromis (élection des maires, sauf dans les grandes villes, service militaire de 5 ans, avec tirage au sort, réduit à moins d’un an pour les bons numéros, impositions des valeurs mobilières et nouveaux impôts indirects, mais pas d’imposition générales sur le revenu).
Mac-Mahon (1808 – 1893)
Il participe d’abord à la conquête de l’Algérie, se distingue durant al guerre de Crimée et devient maréchal et duc de Magenta après cette bataille. Gouverneur de l’Algérie de 1864 à 1870, il est battu en août 1870 par les Prussiens, et fait prisonnier à Sedan. Libéré à la demande de Thiers, en mai 1871, il commande l’armée Versaillaise qui écrase la Commune parisienne. Favorable aux monarchistes, il est choisi par eux pour succéder à Thiers en 1873 comme Président de la République. Après s’être soumis à la majorité républicaine en 1876, il démissionne en 1879.
Le Maréchal est choisi par les royalistes pour succéder à Thiers, en attendant une prochaine restauration permise par le désistement du comte de Paris. Mais les orléanistes n’entendent pas pour autant renoncer à leurs idées : le refus par le comte de Chambord d’accepter le drapeau tricolore est le symbole de l’impossible réconciliation (octobre 1873). La restauration est repoussée à plus tard, et en novembre 1873, l’Assemblée maintient pour 7 ans Mac-Mahon dans ses fonctions, avec comme principal ministre le duc de Broglie, catholique libéral.
En 1875, la même Assemblée vote trois lois constitutionnelles organisant le régime, mais sans en préciser la nature; le pouvoir exécutif revient à un Président de la République (mais le terme « République » n’apparaît qu’à la suite de l’Amendement Wallon, voté avec une seule voix de majorité); le pouvoir législatif est partagé entre une chambre de députés élue au suffrage universel direct, et un Sénat composé à la fois de membres inamovibles et de membres élus par de grands électeurs (députés, conseillers généraux, conseillers d’arrondissement). Si le Président de la République forme le gouvernement et peut dissoudre la Chambre des députés, celle-ci vote les lois et le budget, contrôle les ministres qui doivent obtenir le soutien de sa majorité.
Cette Constitution votée par une Assemblée favorable à la monarchie et considérée comme provisoire, doit permettre la substitution d’un roi au Président de la République. Elle comprend pourtant des dispositions libérales (suffrage universel, rôle de la Chambre) qui satisferont les républicains et lui permettront d’être maintenue jusqu’en 1940.
Les personnalités de la Commune
Des personnalités indépendantes s’engagent totalement, tels l’écrivain Jules Vallées, le peintre Gustave Courbet, le poète Jean-Baptiste Clément, le professeur Gustave Flourens tué au combat. Louise Michel (1830 – 1905), militante socialiste, fut déportée en Nouvelle Calédonie.
La politique européenne de la IIIe République française
En dehors de la colonisation, l’essentiel de la politique extérieure française lors de la IIIe république est constituée par une action diplomatique visant à rapprocher la France de ses anciens ennemis. Ainsi, dès la fin des années 1870, les relations franco-allemandes se sont sensiblement améliorées; l’Allemagne voit en effet d’un bon œil l’expansion coloniale de la France qui la détourne de l’idée de revanche et l’opposé de la Grande- Bretagne. Pourtant, à partir de 1887, la tension remonte entre les deux États, à la suite de plusieurs incidents frontaliers, exploités par les milieux nationalistes des deux pays.
La Triple Entente
La France se rapproche alors de la Russie, où elle exporte des capitaux (les fameux emprunts russes) depuis 1888. En 1891, un accord politique prévoit une consultation en cas de menace de guerre et en 1892, un accord militaire défensif est signé. En 1896, le Tsar Nicolas II vient à Paris poser la première pierre du pont Alexandre III, qui symbolise l’alliance franco-russe.
Vis-à-vis de l’Angleterre, la politique française se modifie progressivement après l’incident de Fachoda (1898). Théophile Delcassé, qui devient ministre des Affaires étrangères la même année, opte finalement pour le rapprochement avec la Grande-Bretagne. Après la visite d’Édouard VII à Paris en 1903, les accords d’avril 1904, qui règlent les litiges coloniaux, ouvrent la voie à l’Entente cordiale franco-anglaise.
La question marocaine met les alliances à l’épreuve, mais se termine par un isolement de l’Allemagne : après que l’Empereur Guillaume II se soit rendu à Tanger en mars 1905 pour proclamer l’indépendance du Maroc et réclamer une conférence internationale, la France obtient la rupture d’un accord secret russo-allemand, et à la conférence d’Algérsiras, en 1906, La Grande-Bretagne et la Russie reconnaissent les droits français sur le Maroc. On assiste même en 1997 à un rapprochement anglo-russe qui permet la formation de la Triple Entente, entre la France, la Grande-Bretagne et la Russie, constituée de fait contre l’Allemagne. Un nouvel incident à propos du Maroc (l’arrivée devant Agadir d’une canonnière allemande, en 1911) aboutit à un accord franco-allemand : les François « achètent » le désistement allemand par des concessions territoriales au Congo, mais cela a pour effet de faire monter d’un cran l’antagonisme entre les deux pays.
Tension et guerre dans les Balkans
La révolution turque qui aboutit en 1908 au triomphe des Jeunes Turcs réformateurs et nationalistes, provoque indirectement la proclamation d’indépendance de la Bulgarie et l’annexion par l’Autriche de la Bosnie-Herzégovine. La Russie voit ainsi son influence dans la région décliner, et son alliée la Serbie est directement menacée par l’Autriche – Hongrie, soutenue par l’Allemagne. La guerre éclate en 1912 : d’abord entre la Ligue balkanique (Serbie, Bulgarie et Grèce) et la Turquie, soutenue par l’Allemagne, puis entre la Bulgarie et la Serbie. Le traité de Bucarest (août 1913) met fin aux hostilités sans rien régler : Allemands et Autrichiens désirent toujours établir une continuité territoriale avec leur allié turc. Inversement, la Russie désire étendre son influence dans les Balkans, et se ménager l’accès à la Méditerranée.
Vers la guerre
Après les conflits balkaniques, le renforcement des liens entre les deux blocs se précise en 1913 et 1914, alors que chacun développe son potentiel militaire et se prépare à la guerre. L’assassinat de l’archiduque d’Autriche François-Ferdinand, le 28 juin 1914, à Sarajevo, sert de prétexte à l’Autriche pour envahir la Serbie, qu’elle juge responsable (28 juillet). Les choses vont alors se précipiter: les 29-31 juillet, la Russie mobilise; le 1er août, après lui avoir lancé la veillé un ultimatum, l’Allemagne déclare la guerre à la France le 3 août. L’Angleterre hésite d’abord à s’engager dans le conflit. Mais l’invasion de la Belgique le 3 août décide les Anglais à déclarer à leur tour la guerre à l’Allemagne (4 août).
Ainsi, rien n’avait pu arrêter le développement des hostilités, aucun pays n’ayant véritablement le désir d’éviter la guerre. La France, en particulier, le vieux rêve de revanche contre l’Allemagne débordait largement des milieux nationalistes, et après l’affaire d’Agadir, la politique de Poincaré avait été de refuser tout nouvel arrangement.
Les armes ont désormais la parole. Ainsi s’ouvrent quatre années de souffrances et de destructions dont la France et l’Europe sortirent affaiblies.
Les causes économiques de l’expansionnisme
La colonisation, la recherche de zones d’influence dans le monde peuvent s’expliquer par des motivations géopolitiques et par le nationalisme des États européens. Mais elles proviennent aussi de rivalités économiques. Elles sont liées :
- à la recherche de matières premières industrielles et de produits alimentaires tropicaux ;
- à la conquête de marchés extérieures permettant d’écouler les surplus de production des pays industriels qui augmentent avec le progrès technique, remédiant ainsi à la saturation des marchés européens. C’est ainsi que Jules Ferry peut déclarer : La politique coloniale est fille de la politique industrielle ;
- à la pratique de taux d’intérêt élevés de la part des pays « neufs » pour attirer les capitaux des pays plus développés afin de pouvoir financer leurs programmes d’investissement (chemin de fer, grands travaux).
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